Voici un bouquin que m'a preté Alexis, il traite de la manipulation de la parole, tres instructif, néanmoins, je ne le conseille à aucun dieudonniste ni extremiste de tous bords car il pourrait les conforter dans leur vision paranoïaque et communautaire du monde.
La parole manipulée - André BRETON
Editions La découverte / Essais, 1997
Ci-dessous un passage que j'apprecie tout particulierement :
"La seduction par le style
Une forme elle aussi tres ancienne de seduction en vue de persuader autrui est l'usage du style comme écart par rapport au contenu. Un orateur qui parle bien a tendance a etre plus convaincant, en quelque sorte sans raison. La manipulation commence quand son "bien parlé" se substitue à l'argument lui-même, dont il cesse d'être un accompagnement pour devenir l'élement central de la situation.
L'usage des "figures de style" littéraires est un des ressorts les plus fréquents de la manipulation. La "formule" se propose de convaincre alors qu'elle n'est qu'un ornement. De nombreux discours de l'extrème droite, outre d'autre éléments manipulatoires qui se combinent entre eux, ne sont formés que de figures de style, de formules chocs, de mots d'esprit. Ainsi, dans un texte prototypique que nous avons analysé dans un précédent ouvrage (Philippe Breton, l'argumentaire dans la communication, La Découverte, "Repères", Paris, 1996), l'auteur, partisan des thèses d'extrème droite, ne developpe, pour critiquer ce qu'il appelle l'"acharnement intégrationniste", que des figures de style sans contenu. Il oppose par exemple les "Français de coeur" aux "Français de ventre", qui "ont des papiers français mais n'ont ni le coeur ni l'ame ni l'esprit français" (et qu'il propose de raccompagner à la frontiere). Le comble de ces procédés réside dans les formules, destinées à un certain public qui en apprecie le style, qui, tel le "Durafour-crématoire" d'un dirigeant de l'extrème droite française, véhicule, via le style, un message antisémite quin'est, évidemment, jamais argumenté en tant que tel.
Les messages publicitaires utilisent à foison, non plus cette fois-ci uniquement avec des mots, mais le plus souvent avec des images, l'ésthétisation du message en vue de le rendre, pour cette seule raison, crédible. Blanche Grunig, après avoir analysé un corpus de 1400 slogans publicitaires, souligne que "nous ne nous méfions pas du réseau que tissent autour de nous des formes qui nous séduisent"(Blanche Grunig, Les mots de la publicité, l'architecture du slogan, Presses du CNRS, Paris, 1990). L'auteur montre bien le caractère extrêment "stylisé" des messages publicitaires, qui font appel à une esthétique des figures finalement assez classique. "