Jia Zhang-ke réalise Plaisirs Inconnus (2002), son troisième long et s’impose déjà comme un cinéaste à part. En trois films, il impose un style et témoigne d’un regard particulier sur ses contemporains et la société chinoise dans son ensemble. Sa caméra, proche des personnes filmées se rapproche, d’une certaine façon, du documentaire (effet que renforce le numérique qu’il utilise) tant elle s’immisce dans l’intimité des protagonistes qui survivent dans une Chine en mutation, mettant de côté les laissés pour compte. Cette dernière prend le modèle occidental comme leitmotiv d’avancée économique, référée par une image de l’Amérique omniprésente, via ses marques et ses films notamment avec la scène de vente de DVD piratés. Nous sommes bien loin de la Chine de Mao…
Dans Plaisirs inconnus, Jia Zhang-ke s’intéresse comme dans ses deux premières œuvres cinématographiques aux oubliés : les oubliés du développement chinois ou ceux qui ne profitent pas de l’essor et de la vie de rêve qui va avec. La société chinoise que Jia Zhang-ke montre est celle de l’individualisme poussé à son extrême, celle de la réussite personnelle et celle qu’elle entretien avec l’argent. Sa caméra, Jia décide de la faire évoluer dans l’environnement d’une cité industrielle. Dans Plaisirs Inconnus nous sommes dans une province du Nord de la Chine.
Là, Jia met en scène deux amis âgés tous deux de dix neuf ans, Xiao Ji et Bin Bin, inséparables. Ils passent leur temps à ne rien faire, flânent ici et là et ne travaillent pas. Xiao Ji tombe alors amoureux de Qiao Qiao, une chanteuse locale vantant les mérites de vins et de liqueurs venus de Mongolie. Il entreprend de la séduire malgré la présence de son manager qui est également son fiancé. De son côté, Bin Bin a une relation avec une étudiante qui n’est pas prête à s’engager.
Jia Zhang-ke traite de la jeunesse chinoise actuelle, celle loin de Pékin, celle qui perd tout repère dans une Chine en constante mutation. Il y montre au travers de ces deux personnages masculins l’ennui et l’errance. Il y dénonce une nouvelle mentalité, celle de l’argent-roi où l’argent fait l’homme. Jia, avec son personnage féminin montre également une nouvelle génération montante de femme au caractère déterminé ; Qiao Qiao est intrépide et sait ce qu’elle veut.
Jia Zhang-ke accompagne alors ses personnages dans une contemplation filmique qui pourrait en rebuter plus d’un par de longs plans montrant la souffrance, le dépit ou bien la fatalité des protagonistes. Une jeunesse désoeuvrée pour une œuvre des plus pessimiste à leur égare.
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I.D.