DECRYPTAGE RELATIO: Angela Merkel n’a jamais été aussi haute dans les sondages (80% d’opinions favorables), mais la grande coalition entre dans une phase nouvelle : l’essentiel de son programme a été (bien) réalisé, et les prochaines échéances électorales créent quelques incertitudes, attisent quelques tensions, et suscitent des interrogations. Logique. D’autant plus que le parti de la chancelière a visiblement plus tiré parti des retombées de l’action gouvernementale que ses concurents-alliés sociaux démocrates. 40 % intentions de vote pour l'Union chrétienne démocrate (CDU), contre 25 % seulement pour le Parti social-démocrate (SPD).(Aux élection de 2005, 35,2 % des voix étaient allées à la CDU-CSU et 34,2 % au SPD).
C’est sur sa gauche que le SPD semble avoir perdu de voix et de sympathies…Deux ans des élections législatives (si elles ne sont pas anticipées), les sociaux-démocrates ont présenté leur projet de nouveau programme, qui doit être débattue fin octobre lors d'un congrès. A l’honneur : la référence au « socialisme démocratique » sous la pression de son aile gauche bien sûr, mais aussi pour tenter de contrer le nouveau Parti de gauche fondé par l'ancien président du SPD Oskar Lafontaine et les héritiers du parti communiste de l'ex-Allemagne de l'Est, premier parti d'opposition, avec plus de 10 % d'intentions de vote, selon les sondages, juste devant les libéraux et les Verts.
« Le socialisme démocratique » ? « La vision d'une société solidaire, libre et équitable, dont la réalisation constitue pour nous un devoir permanent. » Une expression plus « musclée » que la « démocratie sociale » du courant « pragmatique » du SPD. Avec la mise en relief de la nécessité d'un « Etat social prévoyant » qui doit mettre davantage l'accent sur la prévention et la couverture sociale et des enjeux écologiques.
Le problème pour le SPD, c’est que Mme Merkel, elle aussi, met l’accent sur la dimension sociale et écologique des solutions qu’elle propose aux problèmes et que les démocrates-chrétiens ont beau jeu de dénoncer derrière ces changements de vocabulaire un « retour à la tentation gauchiste » des socio-démocrates.
Ce « virage à gauche » (qui reste à confirmer) intervient alors que quelques signes laissent prévoir un essoufflement de l’économie allemande.
>>>Ainsi, l'indicateur de confiance des entrepreneurs allemands accuse une baisse pour la quatrième fois consécutive en septembre, selon les chiffres publiés par l'institut de conjoncture allemand IFO. Le baromètre, qui mesure le moral des chefs d'entreprise, s'établit à 104,2 points contre 105,8 en août.
>>>Du côté consommateurs, l'optimisme ne semble pas de mise après la publication d'une étude sur les rémunérations des travailleurs allemands publié et interprété par Bild. Ces résultats confirment les révisions à la baisse des prévisions de croissance, déjà ajustées lors de la crise des "subprimes". Berlin, qui annoncera ses pronostics révisés le 25 octobre, parie sur +2,3 % de croissance cette année, après 2,9 % en 2006.
Dans ce contexte, nombre d’observateurs n’écartent pas l’hypothèse d’une rupture de la grande coalition, avant terme. D’autant plus que les responsables des deux partis se souviennent de la fin de la première grande coalition de l'histoire de la République fédérale (1966-1969) : les relations entre les deux partenaires étaient devenues exécrables. Qui plus est, le SPD n'a pas de candidat crédible à la chancellerie, ou plutôt (le PS connaît cela) il en a… plusieurs qui ne sont pas d’accord entre eux sur les futures alliances à envisager : les libéraux, les Verts, voire les renégats et les anciens communistes du Linkspartei …
Mais pour Angela Merkel, il y a une inconnue de taille : l’avantage qu’elle a aujourd’hui ne fondrait-il pas si elle prenait le risque d’interrompre (pour des raisons de tactique politique) une législature prévue pour quatre ans par la Constitution.Une législature qui, pour l'heure, a un excellent bilan.