Bernhard Schlink
Editions Gallimard
Collection Folio
Traduit de l'Allemand par Bernard Lortholary
242 pages
Quatrième de couverture: A quinze ans, Michaël fait par hasard la connaissance, en rentrant du lycée, d'une femme de trente-cinq ans dont il devient l'amant.Pendant six mois, il la rejoint chez elle tous les jours, et l'un de leurs rites consiste à ce qu'il lui fasse la lecture à haute voix. Cette Hanna reste mystérieuse et imprévisible, elle disparaît du jour au lendemain. Sept ans plus tard, Michaël assiste, dans le cadre de ses études de droit, au procès de cinq criminelles et reconnaît Hanna parmi elles. Accablée par ses coaccusées, elle se défend mal et est condamnée à la détention à perpétuité.Mais, sans lui parler, Michaël comprend soudain l'insoupçonnable secret qui, sans innocenter cette femme, éclaire sa destinée, et aussi cet étrange premier amour dont il ne se remettra jamais. Il la revoit une fois, bien des années plus tard. Il se met alors, pour comprendre, à écrire leur histoire, et son histoire à lui, dont il dit: " Comment pourrait-ce être un réconfort, que mon amour pour Hanna soit en quelque sorte le destin de ma génération que j'aurais moins bien su camoufler que les autres ? "
Le liseur est une histoire d'amour à la fois triste et victime de circonstances historiques qui la place dans une catégorie à part. Histoire d'un amour énigmatique, entre deux personnes qui se sont rencontrées par hasard. Michaël, âgé de 15 ans a toute sa vie et sa jeunesse devant lui; il va tomber amoureux de Hanna qui en a 35 et dont le présent reste caché et mystérieux. Leur relation est étrange, faite d'une pudeur spirituelle mais empreinte d'un rapport charnel, d'un besoin du goût de l'autre. Une intimité se crée, entre lecture à voix haute et rapport corporel. L'un ne va pas sans l'autre. Michaël s'interroge et il se consume dans cet amour à sens unique pourrait-on dire. Il est heureux et vit cet amour de toute ses forces. Etrangement, ce n'est pas passionné, ce n'est pas fougueux, c'est comme des mots qu'on lit: calmes, discrets, solitaires mais qui pénètrent l'âme. Brusquement, Hanna part et Michaël ne la reverra que lors d'un procès où plusieurs femmes sont accusées de meurtres volontaires en qualité de surveillantes SS. Michaël, étudiant en droit assiste à ce procès et reconnaît Hanna, la principale accusée. Il comprend cette histoire d'amour qui la tant dépossédé de lui-même, privé de l'insouciance de la jeunesse et d'une certaine manière de son innocence. Il retrace son histoire et celle d'Hanna à la lueur de ses actes: son silence sur ce qu'elle faisait, cette distance dès qu'il essayait de la connaître mieux et comprend pourquoi elle aimait tant qu'il lui lise des livres...
Le liseur est l'histoire troublante néanmoins tendre et émouvante d'un adolescent qui découvre l'amour, ce qu'il peut y avoir de plus douloureux dans la vie, qui s'en sépare pour mieux devenir homme.
Je suis agréablement surprise par Le liseur, le tout premier roman que je lis de Bernhard Schlink. Attirée surtout par l'adaptation cinématographique, j'ai voulu goûter le livre avant de voir les images. Et Le liseur est un roman qui m'a touchée. L'écriture d'une très grande qualité est fine et coule de source. D'un amour qui pourrait être choquant, incestueux, l'auteur le dépeint comme un acte naturel, tendre, d'une douceur et d'une délicatesse qui frôle une sensualité à demi-voilée. La découverte des sens, du toucher, et la naissance de sentiments saisissants font de Michaël un personnage extraordinaire auquel on s'attache dès les premières pages. Son destin est tout écrit à l'ancre des mots qu'il lit, à la lueur de son dévouement pour Hanna. C'est très beau, c'est à la fois simple et triste. Quand Hanna part, on pressent qu'il la reverra et que, de toute manière il ne l'oubliera jamais. Elle reste là, en lui. Puis vient le procès et les questions qu'il pose: la culpabilité, mais tout n'est pas blanc ou noir. J'ai ressenti de la pitié et même de la sympathie pour Hanna. Tout s'éclaire pour Michaël alors que ses sentiments sont contradictoires. Son esprit retrace le passé à la lumière d'une Hanna qu'il n'a pas connue. Hanna l'accusée fait face à Hanna l'aimée. Et pourtant ces deux facettes sont celles d'une unique personne. Le liseur est un roman qui pose des questions essentielles, philosophiques et existentielles, qui font écho à ce que chacun d'entre nous peut ressentir ou pose cette question importante : comment réagirait-on à la place de Michaël. Qu'aurait-dû t-il faire? Le liseur est donc un superbe roman, d'une profondeur psychologique exacerbée et d'une écriture si sereine et sobre qui contraste avec le poids d'une histoire d'amour qui me semble dramatique. Un personnage qui souffre, un repenti bouleversant... un amour qui laisse des séquelles. Un roman de grande envergure.