[Cyrille réagissait à la note Uteq= Unité territoriale de quartier != Proximité ? et au commentaire lié de Benjamin ] :
Et pourtant, elle n’est que révélatrice d’un esprit d’escalade, largement entretenu par la droite, Sarkozy en tête, qui ne peut conduire qu’au désastre.
Si les soi-disant 2% qui ne sont pas « paisibles et honnêtes » (chiffre à prendre avec des pincettes…) sont si nombreux, c’est justement parce que la police française, au moins depuis les années Pasqua, est de moins en moins une police républicaine et qu’elle maltraite les populations.
Sûre d’elle-même, en particulier à cause de cette surenchère politique, de l’impunité des bavures, du manque de contrôle, de formation et d’encadrement, elle multiplie les abus de pouvoirs, les provocations, etc. Les jeunes (et moins jeunes) déjà désespérés par le chômage, les exclusions, les difficultés de logement, etc. choisissent alors vite leur camp. Et grâce à cette attitude policière maintenant généralisée, des jeunes désemparés sont recrutés par les vrais délinquants qui trouvent là un terrain propice à leurs trafics et exactions.
Le vocabulaire « reconquérir le terrain », « le territoire de la république ne doit pas être abandonné », « riposte » est singulièrement militaire. C’est bien ça la question : on a transformé un problème de délinquance en une guerre de gangs ; on a transformé notre police républicaine en un espèce de gang parmi les autres.
Quand les 98% de gens « paisibles et honnêtes » commencent à prendre partie pour les 2% autres contre la police, la preuve de la dérive sécuritaire est faite…
Ainsi, après les émeutes de Villiers-le-Bel, ou des affrontements à Grigny, Clichy-sous-Bois, etc., on a vu, entendu, ces témoignages de mamies, de commerçants (oui des commerçants !), d’ « honnêtes « pères ou mères de familles qui, en substance, disaient : « les jeunes ont tord, ce n’est pas bien, mais quand on voit comment ils sont traités par la police, on comprend ».
J’habite un quartier parisien populaire, mais pas « chaud », comme on dit. En face de chez moi, un commissariat… Chaque jour, c’est abus de pouvoir sur abus de pouvoir : tutoiements inconsidérés, fouilles au corps inutiles, sirène hurlantes au milieu de la nuit sans qu’il y ait de circulation, dérapages au frein à main devant le commissariat (véridique !), passage en sens interdit systématique, même quand ce n’est pas nécessaire, etc.
Et ces abus de pouvoir sont encouragés par le système : pas d’enregistrement des gardes à vues (en Angleterre, elles sont systématiquement filmées depuis des années), port de la ceinture de sécurité non obligatoire (on est un des derniers pays…), bavures généralement non sanctionnées, gardes à vues abusives tolérées, quasi impossibilité de recours des citoyens, etc.
Le pire, c’est que l’on peut être inquiets pour ceux des policiers qui croient à la République, en une police protectrice des citoyens et démocratique. Que deviennent-ils ? On les transforme en gardes chiourmes sur-armés dont le seul but est de faire du chiffre. Un début de réponse à cette dérive avait été trouvé avec la police de proximité. Ce n’était pas « reconquérir le terrain », c’était enfin mettre la police au service de la population. Sarkozy a tué l’expérience dans l’œuf. N’a-t-il pas été élu grâce à la délinquance ?
Il ne faudrait pas qu’elle disparaisse… qu’aurait à montrer TF1 pour le faire réélire ? Il y a de grande chance que les UTEQ soient encore un des nombreux tours de passe-passe destinés à nous faire oublier la vraie nature populiste et inégalitaire du régime Sarkozy :un cache-sexe à toujours plus de dérive sécuritaire. Un prétexte pour de nouvelles provocations qui fera dire à de plus en plus de monde qu’il faut une “riposte énergique“, des “descentes en force“, “reconquérir le terrain“, etc.
Cyrille