Être reconnu en tant que personne faisant partie d’une société dans laquelle elle vit peut paraitre une évidence et doit être une évidence.
Mais qu’en est-il réellement aujourd’hui ? Je suis de plus en plus frappé par ce je pourrais appeler le désarroi de beaucoup d’entres-nous. Le désarroi, le mot n’est pas trop fort pour illustrer les réactions des français sur leur vie quotidienne, sur la politique, sur leur avenir, sur leur profession.
Toutes les composantes de la construction de la vie sont touchées.
Qu’il s’agisse des jeunes qui consciemment ou pas ne sont plus concernés par la passé et délaissent ainsi de nombreuses valeurs que leurs prédécesseurs ont essayés de préserver tant bien que mal.
Qu’il s’agisse des parents, lesquels pris entre deux feux, celui d’éduquer leurs enfants et celui de se construire eux-mêmes dans la tourmente économique de notre époque.
Qu’il s’agisse des anciens que le monde actif relègue au nom de la technologie ou d’idées « dépassées « .
Et surtout qu’il s’agisse du monde de l’entreprise emportée dans une tourmente mondiale qui tente de justifier la maléabilité des salariés.
Toutes ces composantes ne laissent plus pace à la reconnaissance.
Pourtant c’est sur celle-ci que repose l’équilibre, la conscience de l’apport que l’on peut faire à la société.
La reconnaissance au mérite n’est pas un élément de reconnaissance. Vouloir récompenser pécuniairement le mérite ne peut entrainer que des ressentiments. Qui va définir le degré de mérite de tel ou tel ? Cela ne peut entraîner qu’une pression supplémentaire, car cela ne peut se faire que dans la subjectivité.
Nul besoin d’argent pour la reconnaissance. La valeur de celle-ci se suffit à elle-même et permet à l’individu d’exister parmi les autres.
A quoi bon donner de l’argent à un salarié tandis qu’en même temps on dévalorise sa personnalité par une exploitation physique et morale ?
A quoi bon le distinguer au mérite pendant qu’en même temps on démérite d’autres ?
Il est plus facile pour un employeur de désigner quelqu’un au mérite que de lui exprimer sa reconnaissance pour un travail bien fait.
Il semble qu’actuellement que pour un employeur, exprimer sa reconnaissance à son employé c’est entamer son potentiel d’autorité, tout préoccupé qu’il est de détenir seul le savoir.
J’espère que vous voudrez bien me pardonner de citer un exemple personnel. J’ai été engagé à 54 ans dans une entreprise dont le propriétaire et donc mon employeur était beaucoup plus jeune que moi, mais surtout totalement incompétent dans la profession.
La conséquence était que toutes mes convictions professionnelles basées sur une solide expérience ne suffisaient pas à le convaincre. Il préférait s’en remettre à des notions fumeuses de marketing qui lui permettait de « retrouver « une autorité qu’il croyait menacée. Ce qui bien entendu n’était pas le cas. Bien au contraire car, l’expression de reconnaissance envers quelqu’un entraine en retour la même reconnaissance parce que cela se situe au niveau de l’individu et non au niveau de l’individu « économique « .
Le mérite s’exprime en terme financier ou de récompense alors que la reconnaissance s’exprime en terme de sentiments.
Il s’agit là d’une différence fondamentale qui privent les hommes d’une ressource psychique nécessaire pour son évolution.