Le Crystal Symphony en escale à Bordeaux
Quoi de plus banal qu’un paquebot à quai au printemps ou en été ? Franchement ? Sauf que là, ce n’est pas n’importe quel paquebot : le Crystal Symphony, qui dépasse 200 mètres de long, est le plus grand que le port de la Lune peut accueillir. Pour le reste, c’est un paquebot lambda : barre de HLM flottante pour le style, clientèle tirant
plutôt vers la soixantaine, équipage en partie philippin, immatriculation à Nassau. Quoi de plus banal ? Tout en fait, puisque les paquebots se font un peu plus rares chaque année. On est très loin des trente (ou même quarante je crois, à la grande époque) paquebots en une saison. Si j’ai bien lu le site web de la mairie, le prochain rafiot de ce genre devrait pointer sa proue fin août. Ça laisse le temps d’admirer le marron clair de l’eau du fleuve, fleuve vide, si désespérément vide.Le Crystal Symphony a fait une escale de 24 heures chrono et est reparti mercredi à 13 heures 30, après que les lamaneurs eurent libéré la dernière amarre. Juste avant, les derniers
passagers avaient embarqué, la passerelle avait été otée par un engin de levage fort bruyant, et les cheminées crachaient bien noir, pour montrer que là-dessus, les moteurs, c’est pas du pipeau. Les “pouèèèèètttt” graves et profonds de rigueur retentirent dans le cagnard bordelais de ces quais sans ombre, quelques mains s’agitèrent, un passager cria “Au revoir la France, merci beaucuuuu”, une soubrette sur le pont inférieur tendit les bras comme si elle avait laissé là l’amour de sa vie. Le navire passa lentement devant nous ; ça me fait toujours quelque chose de voir ces bateaux partir. Puis il s’éloigna, et disparut dans le dernier coude avant le pont d’Aquitaine.éÉÉ
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