26 avril 1906
LE CANDIDAT RIGOLO
Au Café de Paris
à Brest
Déclaration
du chansonnier
d'Artigues
Hier soir a eu lieu, au Café de Paris, devant un nombreux auditoire, la première grande réunion électorale donnée par le citoyen Raymond d'Artigues,.poète chansonnier, candidat dans la première circonscription de Brest.
Après toute une série de monologues et de chansons rosses, mais spirituelles, dits avec un sentiment exact des nuances par Pascal, “le candidat rigolo” a donné connaissance de sa profession de foi, dont nous extrayons les passages suivants.
Messieurs les électeurs.
Je m'en viens, ce soir, soumettre à votre juste appréciation mon programme électoral.
Comme vous l'ont indiqué les nombreux journaux qui soutiennent ma candidature, je me présente à vos suffrages comme candidat j’men foutiste en mi-bé mol
Vu l'effervescence que mon prochain triomphe produit sur les électeurs brestois, les autorités civiles et militaires craignent, que mes admirateurs profitent des troubles du premier mai pour faire un coup d’Etat et m'élever sur le trône de France ; les autorités civiles et mimitaires, dis-je, ont résolu de me surveiller de très près et d’empêcher le moindre coup de force que je puisse tenter.
C’est pourquoi la ville de Brest recevra bientôt la visite de 500 dragons, que le gouvernement de la République m'octroie comme garde du corps.
Laissant, dit-il, de côté les questions préliminaires, j'arrive au cœur de la question.
“Contrairement aux autres candidats, qui vous donnent, I'assurance de faire beaucoup de choses, je ne m'engage à absolument rien; c'est le meilleur moyen de vous convaincre que je ne manquerai jamais à mes promesses.”
Le citoyen Raymond d'Artigues, dont la harangue est fort applaudie, parle encore longuement au milieu de la fumée des cigares et des pipes qui tournoie en spirale dans la salle et voile bientôt le coquet “ Moulin Rouge “ tracé sur les glaces.
Le candidat termina son discours par la péroraison suivante :
“Demain soir et jours suivants, messieurs et chers électeurs, poussant au fond les choses, j'irai crescendo dans mes démonstrations.
Et je suis sûr de vous convaincre, afin que vous me choisissiez comme vôtre député, chose certainement plus facile que d'obtenir de la municipalité brestoise qu'elle vote son budget de 1905.
Aux thunes, électeurs! Aux thunes !
Vive Brest ! Vive la France ? Vivent mes futurs 25 francs !
L'ordre du jour suivant a ensuite voté.
Les électeurs brestois, réunis, au nombre de 130 ,environ, à la grande réunion publique et contradictoire organisée au Café de Paris par Raymond d’Artigues, candidat j’men foutiste en mi-bé mol, le mercredi 25 avril, laissant de côté toutes leurs opinions politiques, s'engagent à faire triompher la candidature autigoudiste de Raymond d'Artigues
- Le Président du bureau, F. PASCAL
- Les assesseurs : Citoyenne Violette et Achille, garçon de café.
On verra d’autre part que M. Raymond d'Artigues a fait sa déclaration officielle à la préfecture de Quimper.
Résultat national de cette élection
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Notre candidat à la députation était avant tout chansonnier.
En fouillant sur le net, j'ai trouvé cette chanson dont il est l'auteur des paroles.
Valse typique
Paroles de Raymond d’ARTIGUES & Emile GHILHOU
& Musique de Mariano CASTELLS
Quant Montmartre la suit
Tapageur, à grands flots s’illumine
Sous la lune qui luit
Les fêtards vont recherchant le bruit.
Dans les recoins bien noirs
Tristement le vieux clochard chemine
Traînant son désespoir
Sous la froide caresse du soir
Sur le bitume, roule, roule
Le pauvre vieux fuyait la foule
Le corps brisé
L cœur navré
Il va désespérer
Et ce pendant qu’il roule, roule
Il pense que s’amuse la foule
Sans s’inquiéter
S’il a diné
Vive la Fraternité !
Tout le long du faubourg
Qu’éclairent à peine les réverbères
Les pauvres filles d’amour
Raccrochent les clients tour à tour
D’un geste indifférent
Accompagné de paroles ordurières
Elles offrent aux passants
De vendre leur corps pour un instant
Sur le bitume roule, roule
La pierreuse parmi la foule
Les joues fardées
Les yeux cernés
Elle devrait faire pitié
Et cependant qu’elle roule, roule
Elle voit par-dessus la foule
Un petit bambin
Joignant les mains
Qui réclame du pain
Quand l’aube vient semer
Sa clarté sur Paris qui s’éveille
Là-bas à pas pressés
Des ombres s’en vont de tous côtés
Ce sont les ouvriers
A peine reposés de la veille
Qui vont à l’atelier
Commencer le travail journalier
Sur le bitume roule, roule
Le flot grossissant de la foule
Le travailleur
Va de bon cœur
Accomplir son labeur
Et cependant qu’ils roulent, roulent
Les ouvriers pensent en foule :
Vas-y mon gars
Ne t’en fais pas
Le patron s’enrichira