Il ne sort pas tant de films de SF que ça. Il sort encore moins de bons films de SF. On pourrait faire une liste impressionnante de films ratés dans le genre si bien que ceux qui sont réussis en deviennent mythiques. C'est le cas de 2001 ou de Star Wars qui ont su donner finalement, chacun dans leur genre, des images au space opera.
Tout ça pour dire que j'ai vu Sunshine. Et autant le dire au risque de passer pour un élitiste forcené, je n'ai pas trouvé ça terrible même si j'en ai lu ça et là quelques avis positifs (assez souvent nuancés cela dit). L'histoire ? Un équipage, à bord d'Icarus II, doit sauver la terre et pour cela, prend la direction du soleil (qui est en train de mourir). Cet équipage va y déposer une énorme bombe nucléaire qui en explosant créera un nouveau soleil. Sept ans auparavant, on avait envoyé Icarus I mais ils ne sont jamais revenus ...
Bon, on est d'accord, le résumé ne donne pas envie tant il sonne comme une pâle resucée d'Armageddon. Mais sur ce point, on n'a pas trop à se plaindre, pas de patriotisme exacerbé, pas de poncifs éculés, Danny Boyle s'en sort (relativement) bien: pas de caricature, les points de passage obligés sont pris en douceur (à condition de ne pas faire la fine bouche en matière scientifique mais passons ... s'il n'y avait que ça ...). En fait, ce n'est pas du tout là que le problème se situe. Le film est hybride et hésite entre plusieurs voies. Quand il choisit finalement, c'est trop tard, on n'adhère plus. Je m'explique:
* On a d'abord indéniablement la fascination pour l'astre solaire. Plus Icarus II se rapproche du soleil, plus c'est
dangereux pour l'équipage. Le film restitue cela assez bien (on sent cependant l'influence de Solaris de Soderbergh qui sur ce point constitue toujours LA référence indépassable) - quitte par moment à se transformer en démo d'effets spéciaux de luminosité.* Après avoir eu sa petite période contemplative (du style Icare: ne regarde pas le soleil de trop près sinon il te crame les yeux), on s'oriente vers la découverte d'un vaisseau spatial à l'abandon (Icarus I). Nouvelle direction prise. Gros ponçif de SF. Perte d'unité d'action en vue.
* On termine par une mini tuerie de l'équipage plutôt irrationnelle (ledit équipage n'a même pas la présence d'esprit de rester au moins deux par deux et ils se font tous tuer sagement comme des lapins). Troisième direction. Celle de trop. On va rassure la Terre est sauvée, mais quelque part on s'en fout. On en veut au réalisateur d'avoir pompé à droite et à gauche dans les poncifs SF sans avoir réussi à avoir un résultat qui se laisse au moins regarder sans déplaisir à défaut d'y adhérer.
Si je résume, un film avec quelques belles images de luminosité. Déjà que j'avais apprécié moyennement The Fountain en dépit de l'aspect trip visuel, là j'ai la sensation d'avoir vu le film qui ferait passer The Fountain pour un chef d'oeuvre (sic !). O tempora, o mores !
Dans la série j'ai-envie-de-faire-un-trip-visuel, je ne pouvais rater le film 300 (n'yyant pas vu la BD, tout ce qui suit ne concerne que le film). L'idée de départ en soi n'est pas mauvaise puisqu'il s'agit de remettre au goût la célèbre bataille des Thermopyles. Pourquoi pas: ça ou autre chose ... Sans être d'une exactitude historique absolue (la scène avec la pythie qui est une des meilleures du film ne colle pas tout à fait avec ce que Plutarque et les auteurs de l'antiquité nous racontent), le film s'appuie sur des faits avérés dans la légende de l'histoire (l'expression peut surprendre mais la bataille des Thermopyles confine au mythe). Il est exact que les enfants malformés étaient jetés d'une falaise, il est exact qu'ils étaient 300 (d'après la légende bien sûr, historiquement parlant, sans doute plus).. etc. Par contre deux choses irritent. D'abord cette insistance sur le terme liberté - à croire que les grecs n'avaient que ce mot à la bouche. Bien sûr la distinction entre homme libre et esclave est très importante dans le monde grec - je ne dis pas l'inverse. Mais je suis loin d'être sûr que les grecs faisaient le guerre pour la liberté. La gloire (comme écrit sur l'affiche), le fait d'avoir son mentionné bien après sa mort - ça ce sont des motifs bien plus grecs.Les perses vus comme des affreux étrangers portant toute la sauvagerie orientale - là aussi c'est forcé. Même si la
débauche visuelle peut sembler tout autoriser, on a du mal à croire que les perses avaient faits des stages à Shaolin. D'ailleurs, je crois que si les perses étaient perçus par les grecs comme des barbares, c'était des barbares bien connus des grecs au fond (surtout que cette bataille fait partie de la seconde guerre médique). En tout cas mieux connus que les indiens qu'Alexandre le Grand rencontra. Les officiels iraniens (d'aujourd'hui s'entend) paraît-il se sont offusqués de la vision des perses dans ce film. Je ne leur donne pas complètement tort mais on a le droit d'être intelligent quand même: le but était ici de montrer un orient fantasmé à travers le prétexte des perses. Xerxes est à mi-chemin entre le dieu (et rappelons-nous que la Perse, c'est la terre d'où vient Zarathoustra dont le nom était connu des grecs) et l'homme efféminé décadent.Si les grecs (d'après les statues qui nous restent) semblaient avoir un idéal de l'homme bien sculpté physiquement parlant, je ne pense pas qu'ils auraient été jusqu'à un tel bodybuilding non plus qui n'a rien de très crédible ni de beau en matière de goût grec. Si vous ne me croyez pas, jetez un coup d'oeil aux statues grecques représentant des hommes, vous ne verrez pas uatnt de muscles saillants. Quant au côté féminin de l'histoire (la reine qui couche avec je ne sais plus qui pour avoir le conseil dans sa poche), je n'ai pas bien compris l'intérêt de l'insérer (quant à savoir si une reine grecque prendrait le risque de coucher avec un autre homme que son mari, là je reste perplexe au vue des lois grecques châtiant ce type de forfait). Un coup d'oeil rapide à la BD originale montre d'ailleurs que ne figurent ni l'épisode ridicule de la reine spartiate ni les muscles saillants.
Mais oublions toutes ces inexactitudes pour un film qui ne vise pas non plus la reconstruction historique. Là où on empêche le film de décoller, c'est en lui collant une voix off très pénible qui essaye de nous forcer à l'enthousiasme guerrier. Sauf que c'est pas l'enthousiasme guerrier, le ton hautement épique qu'on atteint mais plutôt un résultat pompeux du plus mauvais effet. De quoi vous flinguer tout un film.C'est dommage au fond cette voix pompeuse, parce que je vais vous étonner, mais par delà sa reconstruction fantaisiste et ses partis pris discutables, 300 a un avantage: de sonner un petit peu plus grec que Troie qui, croyez-moi, est complètement étranger à Homère et au monde grec. La guerre de Troie, ce sont les dieux qui se battent via les hommes, aveuglant leurs jugements - ce qui explique leurs grossières erreurs militaires et stratégiques. Retirez les dieux à Troie et vous obtenez une guerre totalement incompréhensible. Ce n'est pas parce que Brad Pitt y joue que ça y changera quelque chose.