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Le Barreau du Val d’Oise dit au revoir à Madame DATI

Publié le 17 juin 2009 par Zadvocate

Dans un article paru en avril 2009 dans le magazine Entreprendre, il était prêté à Madame Rachida DATI, Ministre de la Justice et Garde des Sceaux d’avoir qualifié les avocats et les magistrats de très sournois dans leur réaction face aux diverses réformes entreprises.

Ces propos, démentis par l’intéressée, ont vivement fait réagir l’USM qui envisageait même une action judiciaire pour ne pas laisser ses propos sans suite.

Alors que l’on prédit le départ de Madame DATI après les élections européennes, le Bâtonnier de l’Ordre des Avocats du Barreau du Val d’Oise, Eric Azoulay s’est fendu d’un petit courrier d’au revoir à notre ministre préférée.

Le ton m’a beaucoup fait sourire même si le fond n’a rien de drôle. Je vous laisse le soin d’en juger.

Madame le Garde des Sceaux,

Les Avocats du Barreau du Val d’Oise ont pris connaissance des déclarations, non formellement démenties, confirmées par Monsieur Robert Lafont, Président du Groupe Lafont Presse et Directeur d’Entreprendre, selon lesquelles vous avez qualifié de “très sournois” les Avocats et les Magistrats.

Si d’aucuns ont pu s’émouvoir à la lecture de cette citation, en ce qui me concerne, je tenais à vous apporter, au nom de tous les Avocats de mon Barreau, mes plus sincères remerciements quant à la nature de l’épithète que vous avez utilisé avec courtoisie et bienveillance à notre endroit, laissant aux Magistrats le soin de vous faire part de leur point de vue.

En effet, au regard de votre parcours à la Chancellerie depuis votre arrivée en 2007, la profession se doit de faire son examen de conscience.

Nous avons été “sournois”, voire “très sournois”.

Sournois d’avoir laissé nos instances représentatives s’adresser à vous, au cours du débat sur la réforme de la carte judiciaire, dans un esprit de respect et de dialogue afin de connaître vos projets exacts.

Sournois de ne pas avoir immédiatement imité vos méthodes en tentant de vous imposer unilatéralement notre point de vue.

Sournois de ne pas avoir su franchir les cordons de C.R.S. qui nous séparaient de vous pour vous faire état de la réalité de nos quotidiens.

Sournois de nous être inquiétés du sort du justiciable et particulièrement des plus démunis pour lesquels une justice de proximité nous paraissait être une aide indispensable, sans nous être aperçus qu’elle constituait une dépense budgétaire inutile et, pire encore, un élément de plus de nature à favoriser l’assistanat.

Sournois d’avoir eu quelques inquiétudes mesquines au sujet des conséquences que la réforme de la carte judiciaire pouvait avoir pour nos salariés et nos entreprises compte tenu du préjudice économique évident qu’elle allait représenter.

Sournois d’avoir protesté vent debout, comme un seul homme, à l’occasion de votre projet de réforme du divorce en pensant qu’une décision judiciaire valable ne peut être rendue par un professionnel, quel qu’il soit, directement rémunéré par les parties.

Sournois d’avoir tenté de vous faire prendre conscience que nous ne ressemblions pas à l’image d’Epinal de l’Avocat fortuné réclamant des honoraires pharaoniques et injustifiés à des justiciables désoeuvrés.

Sournois de constater que notre profession est constituée, en grande majorité, de techniciens courageux, de petits chefs d’entreprise confrontés à toutes les difficultés économiques du moment et qui continuent, malgré tout, à servir le justiciable, à commencer par les plus démunis.

Sournois d’avoir milité pour les principes dans lesquels nous croyons, tant à l’occasion de l’instauration des peines “plancher” que lors de la réforme de la justice des mineurs.

Sournois d’avoir remarqué que vos grandes déclarations sur la protection des victimes n’étaient jamais accompagnées des moyens financiers nécessaires, notamment par l’attribution de l’aide juridictionnelle automatique, comme c’est pourtant le cas pour les mineurs délinquants que pourtant vous ne cessez de fustiger.

Sournois sur tous les plans d’avoir voulu rester dignes et vivants.

Alors merci, Madame le Garde des Sceaux,

Merci car votre action, vos discours, vos méthodes ont été la source d’un formidable mouvement de solidarité au sein de nos Barreaux.

Vous avez fait de nous, sans le savoir, tel Monsieur Jourdain, une profession soudée.

En d’autres termes, nous sommes aujourd’hui, grâce à vous, une profession unie, déterminée et debout.

Vous nous manquerez.

Je vous prie de croire, Madame le Garde des Sceaux, en l’assurance de ma haute considération.


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