De la Difficulté d’échapper à son Etiquette lorsqu’on est Acteur…

On le sait, l’espèce humaine a la fâcheuse tendance de vouloir mettre des étiquettes sur tout et n’importe quoi. Il faut classer, catégoriser, pour être sûr de s’y retrouver. Le cinéma, et tout particulièrement Hollywood, est coutumier du fait, adorant enfermer les acteurs et réalisateurs dans des rôles récurrents ou des genres bien spécifiques. Il est donc souvent très difficile pour un acteur ayant cartonné dans un type de rôle d’en sortir et de faire autre chose. Et cela peut être extrêmement préjudiciable pour lui, comme j’ai pu le constater il y a quelques temps au travers d’un exemple un peu extrême.
Je me suis rendu il y a quelques temps au cinéma pour voir le film Jeux de Pouvoir (State of Play en VO), excellent thriller de Kevin MacDonald. Le public était calme, concentré, pris dans l’intrigue du film. Mais à un moment donné, toute la salle (moi y compris) a éclaté de rire alors que pourtant la scène qui se déroulait sous nos yeux n’avait rien de comique. Que s’était-il donc passé ? Et bien l’acteur Brennan Brown venait simplement de faire son apparition à l’écran. Mais qui est Brennan Brown, me direz-vous, et pourquoi suscite-t-il l’hilarité par sa simple présence à l’écran, au risque de faire sortir le public du film ?

Brennan Brown est un acteur peu connu qui a surtout trainé ses guêtres dans de nombreuses séries télé (les Law and Order, Gossip Girls, Ugly Betty…). Bref, rien de bien folichon. Mais Brennan Brown est surtout connu au Royaume-Uni des fans de cinéma pour être l’acteur principal des publicités Orange diffusées avant le film. Ces excellents spots, qui incitent le public à couper leurs portables avant le début du film, mettent en scène Brennan Brown en producteur peu scrupuleux voulant à tout prix mettre de la pub pour les téléphones Orange dans tous les films qu’il finance. Il dénature ainsi à chaque fois des projets de films que lui apportent des stars plus ou moins has been (Mackauley Culkin, Val Kilmer, Steven Seagal, Angelica Houston, Dennis Hopper pour en citer quelques-uns…), retravaillant les scripts pour les rendre plus « bankable ». Les excellentes répliques et le jeu sérieux de Brown lorsqu’il sort les pires stupidités font mouche à chaque fois et font de ces pubs de petits bijoux de comédie (et une analyse assez pertinente de la façon dont fonctionne Hollywood). Mais du coup, lorsque le sieur apparait à l’écran dans un rôle réellement sérieux et premier degré, alors que le public vient de voir une de ses pubs une demi-heure plus tôt, il n’est guère étonnant qu’il provoque l’hilarité. On appelle ça la rançon du succès. Pas sûr malheureusement que cela aide la carrière du bonhomme…