Kafka sur le rivage
Murakami revisite le complexe d'Oedipe, nous emmène comme d'habitude dans un monde parallèle et nous raconte le parcours initiatique d'un jeune garçon de 15 ans confronté à la prophétie que son père lui a annoncé. Sa fugue l'amène dans une bibliothèque étrange et mystérieuse où il rencontre la très belle et énigmatique Mademoiselle Saeki et Oshima qui n'est ni tout à fait homme, ni tout à fait femme. Leur destin est lié à celui de Katana, un homme simplet et illétré mais qui sait parler aux chats et à Hoshino son compagnon de route...
J'ai trouvé dans ce roman, en plus du message philosophique, un côté ludique et malicieux, Murakami semble s'amuser à balader son lecteur dans cette univers "enchanté" peuplé de personnages parfois bizarres, parfois farfelus, qui rappelle parfois celui des contes de fées. On trouve dans son écriture un mélange de gravité, d'humour et de poésie. J'ai retrouvé avec beaucoup de plaisir un de mes auteurs favoris. Kafka sur le rivage est à mon avis un de ses meilleurs crus. Peut-être quelques longueurs, une intrigue parfois un peu tordue et compliquée qui entraîne une légère lassitude, surtout vers la fin. Mais la première moitié m'a vraiment passionnée.
Extrait : "Parfois, le destin ressemble à une tempête de sable qui se déplace sans cesse. Tu modifies ton allure pour lui échapper. Mais la tempête modifie aussi la sienne. Tu changes à nouveau le rythme de ta marche, et la tempête change son rythme elle aussi. C'est sans fin, cela se répète un nombre incalculable de fois, comme une danse macabre avec le dieu de la Mort, juste avant l'aube. Pourquoi ? parce que la tempête n'est pas un phénomène venu d'ailleurs sans aucun lien avec toi. Elle est toi même et rien d'autre. elle vient de l'intérieur de toi. Alors la seule chose que tu puisses faire, c'est pénétrer délibérément dedans, fermer les yeux et te boucher les oreilles afin d'empêcher le sable d'y entrer, et la traverser pas à pas. Au coeur de cette tempête, il n'y a pas de soleil, il n'y a pas de lune, pas de repère dans l'espace ; par moments, même, le temps n'existe plus. Il n'y a que du sable blanc et fin comme des os broyés qui tourbillonne haut dans le ciel. Voilà la tempête de sable que tu dois imaginer."
Kafka sur le rivage, Haruki Murakami, 10/18, 638p.