S’il y a bien un truc que je ne supporte pas, ce sont les gens qui digressent. Impossible d’avoir une conversation suivie avec eux. Ils n’arrêtent pas de changer de sujet et de se perdre dans leurs phrases. Ils me fatiguent… Dès qu’ils commencent une phrase, c’est comme s’ils jouaient la suite aux dés. J’ai que ça à faire, moi, de les écouter bavasser et passer du coq à l’âne. Tout le monde ne s’appelle pas Michel Rocard. Dans ses bons jours, ce mec-là était capable d’ouvrir 25 parenthèses dans une discussion et de les refermer consciencieusement, les unes après les autres, pif, paf, pof et clap. Chapeau, l’artiste. Ceux dont je parle ne sont pas du même tonneau. Ils partent en vrille à la première occasion. Inutile d’essayer de les recentrer : c’est comme si vous remettiez un euro dans le bazar. Ça leur donne une autre idée et hop, les voilà repartis.
Et ça ne s'arrange pas avec internet. Avec Twitter, et consorts, on saute sur le premier sujet qui passe, on n’a même pas le temps de le creuser que déjà, on enfourche le suivant. Maintenant, la Toile est rempli de gens qui fonctionnent comme ça, à l’instinct, en zigzag, au jugé. Je regardais récemment la provenance des visiteurs de mon blog.
Vous remarquerez au passage l’orthographe approximative. Allez savoir si cet internaute est inculte, s’il a de gros doigts boudinés ou bien s’il était nerveux à l’instant de découvrir qui allait répondre à la question cruciale qui le taraudait comme un ver à bois dans une poutre en chêne. Oh miracle, en première page de ses résultats, un «Atelier Ted et Eux» à l’air d’être une mine d’information fabuleuse pour obtenir des éléments de réponses. Sinon, notre ami(e) aurait passé une journée horrible. Ou une soirée, une matinée. Allez savoir, s’il est sous le méridien de Montevideo ou celui de la Garenne-Bezons.
Ce n’est pas d’aujourd’hui que je me plains des miniatures. Quand j’étais en fac, il y avait un prof qui écrivait à la craie des mots minuscules sur le tableau de l’amphi. Il fallait une longue vue pour le déchiffrer. Jusqu’au jour où une voix de stentor a lancé du haut des gradins : «Plus petit, y en a qui voit !». J’avais trouvé ça génial, ce gars qui prend l’initiative de dire tout haut ce que tout le monde pense tout bas. J’adore ça. Ça me rappelle une fois, dans le métro, où la porte de sortie s’était bloquée. Vous savez, ces portes vitrées, où il faut appuyer à un endroit précis pour qu’elle s’ouvre. Bref, pas moyen de sortir, et toute une rame se cassait le nez dessus. Et vas-y que je te balance des claques, des coups de poings, des coups d’épaule… Rien à faire.
Ah ah, c’est bon de rigoler un peu. De quoi on parlait, déjà ? Avec tout ça, j’ai perdu le fil. Ah oui, voilà, ça me revient : je ne sais pas vous, mais moi, je déteste les digressions.