L’assureur américain AIG, nationalisé à l’automne, devait confronter lundi son ex-PDG Hank Greenberg devant la justice, pour lui réclamer quelque 4 milliards de dollars qu’il aurait logés dans un fonds à but non lucratif.
Le bras de fer entre l’ex-numéro un mondial de l’assurance, renfloué à hauteur de 170 milliards de dollars par le gouvernement fédéral pour lui éviter la faillite, et son ancien patron s’annonce complexe sur le fond. Elle est entre les mains d’un tribunal fédéral à New York.
L’affaire devrait apporter un éclairage sur l’une des déroutes les plus cuisantes pour une entreprise américaine, dont les activités tentaculaires lui ont déjà valu des enquêtes fédérales, et dont la crise financière a précipité la chute. Les premières étapes du procès devaient débuter lundi vers 13H00 GMT. Le témoignage très attendu de M. Greenberg n’était pas attendu avant mardi, selon l’avis concordant des parties prenantes.
M. Greenberg, 84 ans, n’est pas l’accusé direct dans cette affaire mais est appelé à témoigner au titre du fonds Starr International (SICO), entité à but non lucratif, dont il est l’actuel président. Hank Greenberg, qui a dirigé le géant AIG pendant plus de trois décennies, a été forcé au départ en 2005 en pleine enquête sur les comptes de l’assureur pour manipulations comptables présumées.
Jusqu’en 2005, le fonds SICO servait à loger des actions AIG devant rémunérer des cadres du groupe, selon AIG.
Pour l’assureur, à l’origine de la plainte, les fonds ainsi versés, dépassant une valeur de 4 milliards de dollars selon ses calculs, n’ont pas été restitués depuis la déroute du groupe et sa mise sous tutelle fédérale, et devraient être “confiés à un administrateur fiable” afin que les revenus qu’ils génèrent puissent rembourser les fonds publics.
Ces 4 milliards “appartiennent aux actionnaires d’AIG et aux contribuables américains”, a fait valoir Mark Herr, un porte-parole d’AIG, dans une déclaration à l’AFP. “Hank Greenberg va enfin avoir l’occasion de s’expliquer devant un tribunal sur la raison pour laquelle il a poussé SICO à conserver 290 millions d’actions AIG après qu’il a été forcé à quitter le groupe pour avoir refusé de coopérer à une enquête de justice sur des problèmes comptables”, a poursuivi ce porte-parole.
Selon AIG, “les preuves amassées pour le procès montreront que durant son mandat à la direction d’AIG, M. Greenberg a personnellement et à plusieurs reprises promis que les actions AIG détenues par SICO seraient toujours utilisées pour rémunérer les actuels et futurs employés d’AIG”.
L’accusation veut s’attaquer au statut de SICO, un fonds qui revendique son statut non lucratif, autonome d’AIG, et qui détient de plein droit des actions de l’assureur. “SICO n’était assurément pas une entité à but non lucratif avant que les poursuites ne soient lancées”, fustige AIG, selon qui le fonds n’a restitué que “0,005%” de la valeur de ses actions.
Pour sa part, SICO renvoie à une précédente décision de justice, issue d’une plainte du fonds contre AIG pour d’autres motifs. La polarisation de l’affaire autour de M. Greenberg n’est qu’un “écran de fumée” destiné à masquer un manque de preuves, explique-t-on. “Starr International est une entité indépendante et privée. Les requêtes d’AIG concernant un contrôle du conseil d’administration de Starr ont déjà été rejetées par un juge fédéral”, a déclaré à l’AFP Patrick Dorton, un porte-parole de SICO.
“AIG fait valoir aujourd’hui de manière improbable qu’il a créé +un fonds+ dans les années 1970 doté de plus de 100 millions de dollars – valeur qui a dépassé les 20 milliards depuis -, bien que le groupe ait déjà reconnu que ce +fonds+ n’avait jamais été révélé à ses actionnaires ni aux autorités boursières, jamais inscrit dans son bilan ni ses communications financières”.
M. Dorton affirme qu’en fait AIG ne s’en est pris au statut de Starr “qu’après que Starr a poursuivi en justice AIG parce que ce dernier avait refusé de restituer des oeuvres d’art et des actifs détenus par Starr”.
AFP