Non, vous m'avez mal compris. Le but n'est pas de leur redonner du pouvoir d'achat mais de leur rendre l'existence encore plus compliquée.
C'est la crise, il faut se serrer la ceinture, alors le gouvernement a décidé que les retraites seraient diminuées de 10% pour les non actifs et de 70% pour les retraités encore actifs. De quoi les ramener rapidement vers leur vraie vie de retraité afin de laisser les emplois aux jeunes.
Tout est possible en Lettonie...sauf une dévaluation!
Quid du futur?
Il est clair que la priorité actuelle est de débloquer la dernière part du prêt du FMI; au prix de la détérioration de la dynamique démographique nationale (déjà bien entamée), d'une probable fuite des cerveaux et de travailleurs qualifiés vers des destinations plus attractives.
Quand on sait les potentielles conséquences démographiques sur l'économie, il y a de quoi être très inquiet concernant l'expérience socio-économique post-Keynésienne menée par le FMI.
Hypothèse de départ
Voici une petite démonstration du Baltic Economy Watch (que j'ai volontairement raccourcie) que je trouve excellente car elle expose parfaitement le cercle vicieux dans lequel s'enfonce la Lettonie.
Est-il possible de rétablir une économie en retrait de 18% en ne procédant qu'avec des coupes budgétaires? Voilà la quesiton à laquelle le FMI voudrait que la Lettonie réponde concrètement.
Le procédé, nouvellement baptisé Dévaluation Interne, était plus communément appelée baisse des prix et des salaires dans les années 1930.
L'expérience a maintenant débuté et un nouveau problème semble déjà se profiler: l'impact sur la dynamique démographique et, à plus long terme, sur l'économie. Le retour du boomerang pourrait en effet être très douloureux.
Que se passera t-il si la guérison n'arrive pas, si les salaires et prix mettent tout simplement trop de temps à "s'auto-corriger"?
Les travaux de démographes et d'économistes ont montré les corrélations existantes entre problèmes démographiques et détérioration économique. Les deux graphiques ci-dessous sont en effet très similaires. Surpris? Pas vraiment.
Ces graphiques suggèrent que le déclin de la production industrielle et la baisse des conditions de vie (salaires, allocations, chômage...) entrainent une chute de la "production d'enfants".
Il ne faut pas oublier les flux migratoires dans tout cela. Une variable qui pourrait d'ailleurs s'accentuer dans les années à venir... Même si les données mensuelles fournies par l'Institut des Statistiques letonnes sont probablement sous-estimées, cela donne une vision claire de la tendance: les Lettons quittent le pays.
Continuons. Les deux facteurs précédents ont un impact direct sur l'âge médian de la population. Comme on peut le voir sur le graphique ci-dessous, il s'accroit en Lettonie de manière très rapide et a des implications sur la performance économique et la "gestion" des personnes âgées. (NB:Les données qui ont permis de construire ce graphique sont basées sur un taux de natalité calculé avant la crise).
Les remèdes couramment utilisés pour contrer une population vieillissante est le retour à l'activité des 55-65 ans.
Le premier problème est qu'en Lettonie (et dans les pays baltes en général), les hommes de cet âge sont en très mauvaise santé. L'espérance de vie est plus faible d'environ 10 ans par rapport à l'Allemagne. (voir graph ci-dessous).
Le second problème est que le gouvernement vient d'annoncer aux retraités qu'ils devaient laisser la place aux jeunes et profiter pleinement de leur nouvelle retraite au rabais (-10% je rappelle).
Alors, il s'agit non seulement d'un appel à la dévaluation de la part des économistes et des démographes, mais surtout d'un message fort adressé au gouvernement. Un message lui indiquant d'arrêter ses expériences et de réfléchir aux implications futures qu'auront toutes ces décisions prises à la va-vite.
Dans le même temps, le FMI, par l'intermédiaire de Dominique Strauss-Kahn, vient de faire part de sa perplexité quant aux récentes mesures "pensées" par le gouvernement letton et commence probablement à se rendre compte de l'échec de son expérience: "le FMI est particulièrement préoccupé par le fait que les mesures nécessaires à la réduction du déficit budgétaire vont en priorité pénaliser les plus démunis".
On ressent bien sûr dans ce commentaire l'ancien socialiste qui sommeille en Dominique Strauss-Kahn mais celui-ci est, rapellons le, avant tout un économiste.