C'est sous le terme de « troubles de l'alimentation » ou des « conduites alimentaires » qu'on désigne l'anorexie et la boulimie mentales, deux maladies qui, dans 90 % des cas, frappent des adolescentes et des jeunes femmes âgées de 12 ans à 20 ans.
On a toujours attribué à ces troubles des causes psychologiques, mais selon certaines sources, certaines carences, notamment en zinc, pourraient aussi jouer un rôle.1 Une prédisposition génétique ainsi que des facteurs culturels - obsession de la minceur dans les représentations du corps féminin, notamment - peuvent également intervenir. En effet, ces maladies sont surtout présentes en Occident, les Asiatiques et les Africains y étant peu sujets. On a cependant constaté que leur incidence a récemment augmenté chez ces populations et que l'occidentalisation de leur mode de vie pourrait en être responsable.21 En outre, elles sont assez récentes puisqu'elles ne sont pas mentionnées comme telles dans les traités médicaux du XIXe siècle. Dans la Matière Médicale des Soeurs de la Providence, par exemple, on parle bien d'anorexie et de boulimie, mais, dans les deux cas, il s'agit de conséquences d'atteintes organiques (cancers ou problèmes gastriques) et non de maladies en soi.
Chez les garçons, l'anorexie est très souvent associée à la psychose.
Tant la personne anorexique que la personne boulimique entretient une obsession de la grosseur qui la pousse à refuser toute nourriture ou, au contraire, à se gaver quitte à se purger ou à se faire vomir par la suite ou encore à s'imposer des régimes draconiens ou des exercices physiques intenses et excessifs.
L'anorexie peut avoir de graves conséquences. Elle peut entraîner des problèmes cardiaques (troubles du rythme cardiaque, diminution du volume du muscle cardiaque, crises cardiaques), de l'infertilité, une perte osseuse, un retard de croissance, des dommages aux nerfs et au cerveau, une perte de sensibilité, de l'anémie, de la constipation, des ballonnements. Poussée à l'extrême, la dénutrition consécutive à l'anorexie peut entraîner la mort par arrêt cardiaque.
Quant à la personne boulimique, elle est plus susceptible de souffrir de problèmes des dents et des gencives, de ballonnements, d'irrégularité du rythme cardiaque, de problèmes digestifs, particulièrement d'irritation de la muqueuse de l'oesophage et du rectum (à cause de l'utilisation abusive de laxatifs), de problèmes émotionnels et d'abus de médicaments ou de drogues. Souvent dépressive, elle peut être suicidaire.
Le début des troubles se manifeste souvent en réaction à un événement, qu'il s'agisse de l'éloignement du milieu familial, de la séparation d'un proche (parent, ami) auquel l'adolescente est particulièrement attachée ou encore de la naissance du sentiment amoureux qui la confronte à la problématique de son corps et de sa sexualité.
Toutefois, contrairement aux crises ponctuelles d'anorexie et de boulimie, qui disparaîtront lorsque les effets de l'événement qui les a suscitées se seront amoindris, l'anorexie et la boulimie mentales tendent à s'installer pour de longues périodes et à devenir chroniques.
Le rôle de la famille est d'une grande importance dans le traitement psychothérapeutique. Selon certaines sources, des recherches « démontrent que, vers l'âge de 11 ans et 12 ans, les filles refoulent plusieurs aspects de leur personnalité, souffrent d'incertitude quant à leur identité, leurs attitudes, leurs valeurs et leurs opinions et manifestent peu d'estime à l'égard d'elles-mêmes. »22
En outre, le profil psychologique de l'anorexique est celui d'une personne qui cherche à avoir le contrôle de la relation et qui, par ailleurs, est extrêmement perfectionniste et se fixe des buts très élevés.
Boulimie et anorexie sont souvent vécues en alternance par une même personne, au point qu'il pourrait s'agir en fait de stades d'une seule et même affection, l'anorexie étant le plus avancé.
Symptômes
Anorexie
- Refus de manger ou repas rendus interminables par le tri des aliments, leur mâchonnement, leur stockage dans la bouche.
- Vomissements provoqués après les repas ou prise de laxatifs ou de diurétiques.
- Amaigrissement rapide.
- Refus de maintenir un poids corporel au-dessus du poids minimal normal pour l'âge et la taille : déficit d'au moins 15 %, mais qui peut atteindre 50 %.
- Déni de la maigreur souvent accompagné d'un état de bien-être et d'exaltation triomphante.
- Absence de règles pendant trois mois ou plus ou changements majeurs dans le cycle hormonal.
Note : il est important pour les parents de savoir faire la différence entre le refus de nourriture occasionnel ou temporaire et la véritable anorexie. Pratiquement toutes les adolescentes manifestent un jour ou l'autre un dégoût pour la nourriture, ce qui n'en fait pas forcément des anorexiques potentielles. Il faut tenir compte de la durée et de l'ampleur du comportement et non simplement du fait qu'il se manifeste à l'occasion.
Symptômes indiquant la nécessité d'hospitaliser l'adolescente
- Amaigrissement important et rapide.
- Épuisement physique.
- Ralentissement du rythme cardiaque (inférieur à 50 pulsations par minute).
- Hypothermie.
- Troubles de la conscience et de la vigilance.
- Apathie et prostration.
Boulimie
- Épisodes de fringales de nourriture survenant de façon récurrente, au moins deux fois par semaine pendant au moins trois mois : absorption, en une période de temps limitée, d'une quantité de nourriture largement supérieure à ce que la plupart des gens absorberaient durant la même période et dans les mêmes circonstances. Les aliments absorbés sont généralement des sucreries riches en calories : crème glacée, gâteaux, pâtisseries.
- Ces épisodes sont suivis de comportements compensatoires inappropriés et récurrents visant à prévenir la prise de poids : vomissements provoqués, emploi abusif de laxatifs, diurétiques, lavements ou autres médicaments; jeûne, exercices physiques excessifs.
- Sentiment d'une perte de contrôle sur le comportement alimentaire pendant la crise : la personne voudrait bien arrêter de manger ou manger plus lentement, mais elle en est incapable.
- Estime de soi excessivement influencée par le poids et l'apparence du corps.
- Chez les boulimiques, le poids est généralement normal, mais il y a parfois un embonpoint.
- Plus souvent que chez les anorexiques, présence d'autres dépendances (alcool, drogues) et de comportements plus ou moins acceptables : promiscuité sexuelle, vol à l'étalage (notamment d'aliments).
- Constipation ou diarrhée.
- Gencives et dents abîmées par l'acide chlorhydrique (à cause des vomissements répétés).
- Fluctuations cycliques du poids de 4 kilos ou plus.
- Déshydratation.
La boulimie est souvent accompagnée de :
- Fatigue
- Dépression
- Anxiété
S'ils soupçonnent que leur adolescente souffre de boulimie ou d'anorexie, les parents devraient en outre surveiller les comportements suivants :
- L'adolescente refuse de prendre ses repas en famille;
- elle se rend souvent à la toilette durant les repas et peut faire couler l'eau du lavabo dans le but de masquer le bruit de la chasse d'eau après s'être fait vomir;
- elle ne recherche pas la compagnie d'autrui, préférant être seule;
- elle est parfois ostracisée par ses pairs.
Personnes à risque
- Pré-adolescentes, adolescentes et jeunes femmes dans le début de la vingtaine.
- Athlètes d'élite, particulièrement les filles pratiquant des sports tels que le patinage artistique, la gymnastique et la danse.
Facteurs de risque
- Présence d'autres troubles émotionnels ou mentaux : dépression, anxiété, névrose obsessionnelle.
- Influence familiale : insécurité vis-à-vis des autres membres de la famille; se sent critiquée par ses parents ou ses frères et soeurs.
- Hérédité : les troubles de l'alimentation se retrouvent souvent chez les individus d'une même famille.