En toute logique démocratique, lorsque le Président élu par les français s'exprime solennellement, tous les parlementaires se doivent de l'écouter. Et pourtant cette fois-ci les absents pourraient bien avoir des excuses !
En effet,
Est-il indispensable de se déplacer à Versailles en congrès parlementaire pour assister à un discours monologue qui se veut être l'équivalent du discours sur l'état de l'Union prononcé annuellement au Capitole par le Président des Etats Unis.
Est-il nécessaire de se faire narguer en observant "l'apothéose" du grand homme ?
Tous les français connaissent la passion de leur Président pour le système américain au point qu'on se demande s'il est au courant que notre vieux pays est porteur d'une histoire totalement différente. Ils connaissent également l'ampleur de son ego et des différentes façons de le flatter.
En quoi va consister l'intervention du Président au congrès du 22 juin ?
Nicolas Sarkozy prononcera une allocution devant les parlementaires des deux chambres réunis à Versailles le 22 juin prochain. Un discours qui sera suivi d’un débat sans vote, après le départ du président. Un exercice inédit pour nos institutions qui jusqu’alors autorisaient simplement la lecture d’un discours du Chef de l’Etat par les présidents des deux assemblées.
Ce qui signifie que nous entrons dans une présidentialisation de la 5eme république. Cette modification voulue par le Président et sa majorité n'aura, rappelons-le, été possible que grâce à l'apport des voix d'une partie des élus PRG (Radicaux de gauche) et de celle toute symbolique de Jack Lang (les nouveaux ministres d'ouverture seront-ils pour partie issus de ce geste ?)
Et le Premier Ministre direz-vous ? En effet, à quoi servira dans le futur, le poste ?
Car, lorsqu'on connaît les frais de fonctionnement des services du Premier Ministre on reste rêveur sur leur coût :
Les crédits de Matignon sont passés de 51 à 73 millions en raison, officiellement, du quadruplement du budget du Service d'information du gouvernement qui centralise la communication des ministères. Les effectifs non plus n'ont pas diminué, avec près de 300 personnes au cabinet de Fillon. - Source Challenge
On se dit que tant qu'à être le seul à s'exprimer devant la représentation parlementaire, et s'officialiser "seulmaîtreàbord" notre Chef de l'Etat aurait pu, aussi proposer, comme ultime modification de la constitution : La suppression du poste de Premier Ministre !
Combien ça coute un one man show du Chef de l'Etat devant l'ensemble des parlementaires ?
L’exercice est inédit puisque, avant la réforme constitutionnelle votée le 21 juillet 2008, le chef de l’Etat ne pouvait s’adresser aux parlementaires que par un « message » qui était lu par le président de chacune des deux chambres. Un Congrès est lourd à organiser avec le déplacement à Versailles de quelque 900 parlementaires (577 députés et 343 sénateurs). La présidence de l’Assemblée assure que, dans un contexte de crise, le souci premier sera de veiller aux dépenses. Le budget de ce Congrès devrait être sensiblement le même que celui du précédent, en juillet 2008 (231 571 €). Dans le passé, plusieurs Congrès avaient dépassé les 400 000 €. - Source Le Parisien
A vrai dire, dans une période ou tous les comptes sont au rouge et où on informe les français que l'hypothèse de travailler jusqu'à 67 ans serait bonne pour les comptes sociaux, s'offrir un "spectacle" dispendieux, est-ce bien nécessaire ?
Si à l'UMP, on jubile sur ce nouveau "machin" qui va permettre au Président de jouer à "Monsieur Loyal" devant les parlementaires
Le communiqué du porte-parole de l'UMP, Frédéric Lefebvre, diffusé vendredi 12 juin par la direction de la communication du parti présidentiel, donne la mesure de l'attente : "Le discours du président de la République devant le Congrès est une étape importante du quinquennat qui identifie parfaitement la République respectueuse que défend Nicolas Sarkozy, respectueuse du Parlement, respectueuse de l'expression des Français et respectueuse des sensibilités après la réception des chefs de partis, se félicite le député des Hauts-de-Seine. C'est l'occasion pour le président de la République de nous donner sa vision des changements à poursuivre en France et à engager en Europe, ce que nous attendons comme tous les Français à ce moment précis de la crise."
Dans l'opposition, les choix actuels sont (malheureusement) plus nuancés
Au Parti Socialiste : "Ce qui nous choque, c'est qu'une nouvelle fois le Parlement soit contraint à l'urgence pour un show présidentiel qui s'apparente à une opération de politique intérieure", s'insurge le président du groupe socialiste de l'Assemblée nationale, Jean-Marc Ayrault.
Pour l'instant, il n'est pas acquis que les élus de l'opposition fassent "banquette à l'heure de la grand-messe". "Un vrai débat, ce n'est pas ça", poursuit M. Ayrault, qui a prévu de prendre contact avec l'ensemble des groupes de gauche de l'Assemblée et du Sénat "afin de décider ce qu'on va faire".
"Pourquoi faudrait-il y aller ?, s'interroge le porte-parole des députés du PCF, Roland Muzeau. La réponse est contenue dans la question."
Les Verts, par contre, dopés par leur résultat des élection européennes (un peu plus de 16 % des 40% de votants) sont bien décidés à ne pas venir : Noël Mamère est quant à lui catégorique. "Je ne me rendrai pas à Versailles. Je suis pour le boycottage de cette opération médiatique, affirme le député (Verts) de la Gironde. Il n'est pas question de cautionner cette dérive monarchique du régime où le président agit selon son bon vouloir. Même si ça se passe à Versailles, il ne faut pas confondre le Congrès avec la cour du roi." - Source Le Monde
Et les français dans tout ça ?
Et bien, petit à petit, il apprennent à s'en foutre ou découvrent la résignation. Quel que soit le faste et le bonheur du Président, ils ont compris et savent que celui-ci n'a mis que deux ans pour "supprimer" l'opposition et "endormir" les syndicats en les recevant régulièrement et ... en leur permettant de manifester calmement dès qu'ils en expriment le désir.
A tel point que :
Pour la journée d'action intersyndicale, organisée samedi 13 juin, la CGT a estimé à "un peu plus de 150.000" dans toute la France le nombre de participants aux manifestations. Ils étaient 1,2 million le 1er mai ... / ... A Paris, tous les dirigeants syndicaux seront dans le carré de tête du défilé, de la Bastille à Montparnasse, dont Bernard Thibault, François Chérèque et Jean-Claude Mailly (FO). Toutefois, des lézardes sont apparues dans le front syndical, dont l'unité a été la clé du succès. "Les manifs à répétition ce n'est pas notre tasse de thé parce qu'il y a un peu un phénomène d'usure des salariés", a déclaré lundi Jean-Claude Mailly. Bernard Thibault a dit "regretter" ces déclarations qui "portent atteinte à (la) crédibilité" syndicale. Samedi, FO, qui a plaidé en vain pour une grève générale de 24 heures, devrait être absente dans un département sur deux, selon des permanents de cette centrale. Ce que Bernard Thibault qualifie de "désengagement massif". Solidaires (dont Sud) ne sera pas non plus présent partout. Outre ces tiraillements, le reflux des mobilisations sociales, passées au second plan de l'actualité, complique la tâche des syndicats.
Selon un sondage BVA, 74% des Français trouvent justifié le mouvement de samedi, mais seulement un tiers pense qu'il pourrait inciter le gouvernement à modifier sa politique. - Source Nouvel Obs
Et pourtant : Opinion Way continue à positiver l'action de Nicolas Sarkozy et diluer un peu plus le timide discours de l'opposition et la colère des français.
La proportion de Français satisfaits de l'action de Nicolas Sarkozy augmente de quatre points à 45%, selon un sondage Metro-Krief Group réalisé par OpinionWay*. A l'inverse, 54 % des Français disent être mécontents de l'action du chef de l'Etat, soit une baisse de trois points.- Source Le Point
57 % des Français interrogés pour Le Figaro et LCI par OpinionWay souhaitent que le chef de l'État maintienne les réformes annoncées, contre 41 % qui aimeraient le voir renoncer. Source Le Figaro
On s'achemine désormais vers un déclin irréversible de toutes les oppositions "constituées "à la gouvernance de notre Président et il n'y aura plus guère que les quelques coups de forces des salariés qu'on veut priver d'emploi qui donneront le frisson à l'Elysée. Souhaitons qu'ils soient nombreux !!!
Yves Simon dans les années 70 dans une de ses chansons "j'ai rêvé New York" disait :
- Qu'est ce que la puissance ?
- C'est rester debout au coin d'une rue et n'attendre personne.
Ce n'est pas vraiment notre vision de la démocratie mais c'est visiblement celle que l'homme "enfin seul" de l'Elysée souhaite nous appliquer.
Vous êtes tout seuls, les français. Il va vraiment falloir se réveiller ou se faire bouffer tout cru !!!!