Notes - Michel Feher* - 09 juin 2009
Terra Nova souhaite contribuer à revisiter la position progressiste sur l'immigration, et s'apprête à lancer un groupe de travail sur cette question. Dans cette perspective, nous souhaitons saluer le travail réalisé par l’association « Cette France-là », qui vient de publier son premier rapport annuel sur la politique d’immigration en France et en Europe. Michel Feher, philosophe et président de "Cette France-là", décrit dans cette note pour Terra Nova la dérive des politiques européennes d'immigration et d'asile, de l’approche équilibrée des accords initiaux de Tampere en 1994 vers une vision de plus en plus répressive, et qui se concrétise dans le pacte européen pour l’immigration, grand "acquis" de la Présidence française de l'Union européenne.
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Depuis l’entrée en vigueur du Traité d’Amsterdam, le 1er Mai 1999, l’établissement de règles communes en matière d’immigration, d’asile et
d’intégration des étrangers extracommunautaires est l’une des missions dont l’Union européenne se proclame investie. Pour promouvoir cette communautarisation des politiques migratoires, deux
programmes quinquennaux ont été successivement élaborés : le programme dit de Tampere pour la période 1999-2004 et le programme de La Haye pour la période 2004-2009. Quant au Pacte européen sur
l’immigration et l’asile, dont l’adoption est le principal « acquis » du Conseil européen présidé par la France au second semestre 2008, son ambition est de fixer les lignes directrices de la
politique de l’UE pour les années à venir.
Initialement, trois domaines étaient promis à l’harmonisation: l’intégration des migrants en situation régulière, la protection des demandeurs d’asile et des réfugiés, et enfin le contrôle des
frontières et la lutte contre l’immigration irrégulière. Toutefois, dès la fin du programme de Tampere, les avancées ne vont guère plus concerner que le troisième élément de ce triptyque. Une
telle tendance se voit confirmée, et même accentuée par les textes les plus récents, qu’il s’agisse du Pacte sur l’immigration et l’asile ou encore de la directive relative au « retour des
ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier », adoptée en juin 2008.
Pour justifier la priorité accordée aux volets sécuritaire et répressif du projet de communautarisation des politiques européennes d’immigration, Brice Hortefeux, principal initiateur du Pacte
sur l’immigration et l’asile, invoquait son souci de conjurer l’inquiétude que l’Europe suscite encore chez les citoyens des États membres de l’UE. À ses yeux, privilégier le contrôle des
frontières, la surveillance des migrants réguliers et l’éloignement des étrangers en situation irrégulière aurait donc pour but de « faire évoluer la perception de l’Europe, d’une Europe qui
inquiète à une Europe qui protège. »
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