Le discours qu’Obama aurait dû faire

Publié le 13 juin 2009 par Drzz

Musulmanes, musulmans, Salam Aleikhoum!

C’est un honneur pour moi de vous parler aujourd’hui, depuis cette ville intemporelle du Caire, capitale d’un pays qui fut jadis l’une des plus grandes puissances de son temps, puissance économique, politique, culturelle et scientifique. L’honneur est double du fait que je suis l’invité de l’Université du Caire, entre les murs de laquelle étudia le Prix Nobel de Littérature de 1988, Nabil Mahpouz, auquel je tiens à rendre ici hommage.

Je suis venu vous dire la vérité. Parce que je vous respecte et que je sais que vous êtes capables de l’entendre même si elle parfois difficile. Trop nombreux sont en Occident ceux qui pensent que vous ne supportez que la flatterie, que votre imagination orientale vous incite à préférer une réalité virtuelle dans laquelle vous vous complaisez plutôt que d’affronter celle, bien réelle, dans laquelle vous vivez. Ceux-là sont les vrais racistes. Ils vous prennent pour des enfants un peu attardés et parfois dangereux, qu’il ne faut surtout pas froisser pour éviter des réactions violentes et souvent imprévisibles. “Avec ces primitifs, il faut s’attendre à tout”, se disent-ils. Je n’éprouve pour ces islamophobes que du mépris. Je sais qu’ils ont tort. Je vous connais bien. Je suis chrétien mais mon père est issu d’une famille musulmane du Kenya et durant les années passées en Indonésie, j’ai pu entendre l’appel du Muezzin à l’aube et au crépuscule. Et c’est parce que je vous connais bien que je sais que je peux vous parler vrai et éviter les phrases creuses imposées par le politiquement correct et flagorneur. 

Et la vérité, c’est que le monde musulman va mal. Très mal. Nabil Mahpouz n’est que l’exception qui confirme la règle. Bien sûr, j’aurais pu vous parler de l’apport que doit l’humanité à la civilisation arabe. Mais combien de fois peut-on évoquer l’invention de l’Algèbre, du compas et des outils de navigation, la majesté des arcs, l’élan des flèches de pierre et l’élégance de la calligraphie? Tout ceci appartient à un lointain passé. Le niveau de vos universités est aujourd’hui au plus bas, la somme de vos publications scientifiques insignifiante, l’investissement financier dans l’éducation de vos enfants bien inférieure à la moyenne mondiale.

Sur le plan économique, la situation n’est pas plus brillante. Parce que le monde musulman investit si peu dans le développement et la recherche, il ne produit pratiquement rien. Nul doute que si l’Arabie Saoudite n’avait pas de pétrole, sa situation serait semblable à celle de la Somalie!

Or il n’y a aucune raison pour que cet état de fait ne s’améliore pas!

Vous avez le choix entre deux options.

Vous pouvez accuser le monde entier, et l’Occident en tête, de la situation. Vous auriez sans doute raison. En partie du moins. Dans ce cas, votre politique reposera sur la jalousie, la frustration et la rancœur. Et sur le sentiment d’injustice. Vous vous complairez dans un réconfortant statut d’éternelle victime pleurnicharde. Cette voie ne mène à rien, si ce n’est à une violence stérile. En tant que noir américain, je sais tout ce qu’elle peut avoir de tentante. Mais je sais aussi quel est son potentiel destructeur, en premier lieu pour ceux qui l’adoptent.

Mais il existe une autre voie. Plus dure, moins confortable. Mais elle seule peut amener le changement tant escompté. Mieux: elle porte en elle les germes d’une véritable révolution! En l’empruntant, vous redeviendrez à nouveau les géniaux innovateurs que vous fûtes jadis. Je connais bien cette voie. C’est celle que toute ma vie, j’ai moi-même empruntée. C’est elle qui m’a mené où je suis aujourd’hui. Elle exige avant tout la prise de conscience que “tu es seul responsable de ton propre destin”. 

Au nom de quoi détenez-vous le record du monde des publications de haine et d’incitation à la violence au lieu de détenir celui des publications scientifiques? Pourquoi investissez-vous des milliards de dollars dans l’industrie des armes plutôt que dans l’éducation de vos enfants? Ne vous y trompez pas: ces armes finissent la plupart du temps par se retourner contre vous!

Durant les 6 dernières décennies, 12 millions de musulmans furent assassinés dans le monde. 10 millions d’entre eux le furent par d’autres musulmans! Voilà la vérité! En Afghanistan, en Algérie, en Irak, au Pakistan, en Syrie ou à Gaza, ce sont des musulmans qui tuent d’autres musulmans! Au nom du fanatisme religieux ou nationaliste, dans des conflits d’origine tribale ou communautaire, tous dénués de sens.

Le pire est que cette boucherie se pratique dans l’indifférence générale. C’est à peine si en Occident, on mentionne ces massacres. Et savez-vous pourquoi? Mais à cause du racisme! Parce que les gens pensent que vous êtes différents, que vous ne partagez pas les valeurs communes à tous les êtres humains,  à commencer par celle, suprême, de la vie. Ils constatent les horreurs et se disent :”que voulez-vous, ils sont ainsi: ce sont des arabes, des musulmans”. Et au lieu de leur prouver qu’ils ont tort, trop nombreux sont parmi vous ceux qui les renforcent dans leur racisme en justifiant et glorifiant les massacres!

Trop nombreux sont parmi vous ceux qui célèbrent les “chahidim”, applaudissent lorsque des milliers d’Américains innocents sont tués dans les tours jumelles de New York, louent les terroristes du Hamas et du Hezbollah, rêvent d’Al Qaida, acclament le dictateur de Téhéran, soutiennent ceux qui manipulent de pauvres enfants en leur faisant croire qu’Allah aime le sang de ceux qu’ils envoient se faire exploser au milieu d’autobus ou de restaurants remplis de femmes et d’enfants! Ils ne sont pas des héros, ces soi-disant chahidim! Ce sont des assassins manipulés, et ceux qui les envoient à la mort, confortablement installés dans leurs appartements avec l’air conditionné, sont des lâches!

Musulmanes, musulmans, c’est vous qui êtes les premières victimes des régimes d’oppression et de terreur qui sévissent dans la grande majorité de vos 22 Etats. Il vous est permis d’apprendre des autres. Depuis 60 ans, vous avez pour voisins des Juifs qui ont rebâti avec courage leur ancien Etat. Eux aussi auraient pu être tentés d’accuser le monde entier de leurs malheurs. Ce peuple de réfugiés qui avait été opprimé et persécuté dans tous les pays de leur Diaspora, y compris dans les pays musulmans (si l’on excepte la période de l’Age d’Or espagnol ou tolérance et coopération donnèrent de si beaux résultats), aurait pu, lui aussi, pleurnicher sur son sort et faire du sur place. Regardez ce qu’ils ont su réaliser en si peu de temps! Cette poignée de réfugiés juifs a contribué au développement de l’Humanité plus que le milliard et demi de musulmans. Ils ont à leur actif plus de publications scientifiques, de développement médical, d’inventions technologiques que l’ensemble du monde arabe réuni! 

Mais au lieu de les prendre en exemple, au lieu de voir en eux des alliés potentiels dans la lutte contre la faim , la soif, l’aridité du désert ou la maladie, vous en avez fait le prétexte facile de votre stagnation, l’ennemi par excellence de l’islam et des musulmans! Les Juifs empêchent-ils le moindre égyptien à s’adonner à la recherche médicale? Sont-ils responsables du génocide au Darfour ou des massacres de Somalie?! Jusqu’à quand les rendrez-vous responsables de vos propres échecs? Qu’avez-vous donc à y gagner?

Je dois vous faire un aveu. Mes conseillers m’avaient préparé un tout autre discours. J’étais censé vous parler du droit de vos femmes à porter le hijab, du devoir de laisser l’Irak aux irakiens, de la suprématie de la diplomatie sur l’emploi de la force pour résoudre les conflits, des implantations israéliennes, de l’urgence à fonder un 23ème Etat arabe (un 24ème, en comptant le hamasland de Gaza…) dans cette région du monde…  Mais j’ai préféré vous dire la vérité. Vous dire ce qu’au fond vous savez déjà mais que personne n’a osé jusqu’à présent vous rappeler. Que vous et vous seuls êtes responsables de votre avenir. Qu’il sera ce que vous déciderez qu’il soit. Que vous pouvez redonner à l’Islam et au monde arabe ses lettres de noblesse perdues et sortir de la crise dans laquelle vous vous trouvez depuis des siècles. Les Etats-Unis d’Amérique peuvent vous apporter soutien et encouragements mais c’est à vous de faire le travail.

Yes, you can do it!

Yes you can!

Shoukran!


par Elie Kling

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