que faut il pour que l'homme comprenne?

Publié le 13 juin 2009 par Maaxtal
Le déclin des oiseaux
se poursuit en France
  Yves Miserey
En vingt ans, la population a diminué de 10% environ. Les espèces des zones rurales paient le plus lourd tribut.
Crédit photo : Law Keven

La France a perdu en moyenne 10 % de ses oiseaux communs entre 1989 et 2008. Ces chiffres cachent toutefois une grande disparité selon les milieux et les espèces, ont expliqué hier les scientifiques du Muséum national d'histoire naturelle (MNHN), qui pilotent le programme de comptage des oiseaux communs en France. En effet, on trouve des espèces comme le pigeon ramier, l'étourneau ou la mésange charbonnière dont les populations augmentent et profitent de l'emprise grandissante de l'homme sur les milieux. Alors qu'à l'inverse, des espèces comme l'alouette des champs ou la perdrix grise, pénalisées par l'agriculture intensive, sont en constante régression. Même chose pour des oiseaux forestiers comme le bouvreuil ou des espèces qui nichaient sous les linteaux des bâtiments comme l'hirondelle des fenêtres.

Piloté par le Muséum, le programme Stoc (Suivi temporel des oiseaux communs) existe depuis vingt ans avec une courte éclipse au détour des années 1990 et une reprise en main en 2001. Vingt ans, c'est très peu en comparaison de ce qui s'est fait en Grande-Bretagne ou chez nos voisins européens, où les suivis de population sont anciens et mobilisent des dizaines de milliers de bénévoles contre 1 500 chez nous seulement. C'est suffisant cependant pour voir que le déclin de nombreuses espèces communes se poursuit inexorablement sous nos yeux.

Les réductions d'effectif les plus marquées touchent les espèces des zones agricoles (20 % de baisse en moyenne). Ainsi, la linotte mélodieuse, symbole des campagnes avec l'alouette des champs, a vu sa population chuter de 71 % entre 1989 et 2008, en raison de la raréfaction de ses ressources alimentaires : de petites graines d'herbacées considérées comme de mauvaises herbes et éliminées des zones de grandes cultures. «Contrairement à ce que l'on peut imaginer, les engrais ont plus d'impact sur la végétation que les herbicides, en favorisant certaines plantes, note Frédéric Jiguet, coordinateur du programme Stoc. Il faut repenser l'agriculture.»

«Mode d'exploitation en cause»

Les oiseaux des forêts sont eux aussi en déclin (- 11 % en moyenne) en dépit de l'accroissement continu des surfaces forestières. «C'est le mode d'exploitation qui est en cause, notamment la futaie régulière monospécifique et les coupes à blanc», relève Frédéric Jiguet. Il suffirait de laisser quelques buissons dans les sous-bois pour tout changer. En Suède, où les coupes à blanc sont interdites et où les sylviculteurs ont l'obligation de laisser une dizaine d'arbres par hectare, les populations d'oiseaux forestiers sont en progression.

Les espèces spécialistes d'un milieu (agricole, bâti ou forestier) sont celles qui souffrent le plus de la dégradation de leur habitat. En revanche, les espèces généralistes, celles qu'on retrouve de façon uniforme dans tous les types d'habitats, sont en augmentation (+ 20 %). On trouve pêle-mêle le pinson, les mésanges bleue et charbonnière, le merle noir, le héron cendré, l'étourneau, le pic- vert, etc. Ce n'est pas vrai pour la pie, dont la population diminue. « Des observatoires de la biodiversité comme Stoc sont utiles à la science, mais ils doivent avant tout servir à orienter les politiques de conversation », souligne Bertrand-Pierre Galey, directeur du Muséum de Paris. Le Muséum a mis en place depuis peu plusieurs observatoires : oiseaux, papillons, chauves-souris, escargots et bientôt mares et insectes en partenariat avec l'Office pour les insectes et leur environnement (Opie).

«On a trop longtemps laissé de côté les espèces les plus communes en se focalisant sur des espèces emblématiques comme l'aigle de Bonelli», reconnaît Allain Bougrain-Dubourg, président de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) et membre du conseil d'administration du Muséum. Il a regretté qu'au ministère de l'Agriculture, Michel Barnier n'ait pas sensibilisé la profession agricole à la conservation de la biodiversité. «Notre pays est très en retard», a-t-il souligné.