"Négro-africa
Homme de refus, d’une mémoire très vive, Intellectuel organique d’une valeur rare, homme de principes de courage et d’abnégation, orateur redoutable, Mamadou Samba Diop nous quitte subitement ce jeudi 11 Juin, à l’image de son ami et compagnon, j’ai nommé mon ainé et cousin feu Saidou Kane dit Moustapaha Boli.
Mourtodo était ACCESSIBLE et humble. Négro-africain fier, Mourtodo était profondément musulman et profondément Peulh. Il était donc resté musulman et Peulh. Sa culture Peulh, il l’assimilait, à raison, à un don divin qui devrait être apprécié à sa juste valeur et devrait être, en conséquence, protégée contre les prédateurs culturels et/ou contre les vassaux de l’alienation culturelle occidentale et/ou arabe. Il aimait toutes les cultures. Il était donc tout, sauf un complexé. Il fut un brillant professeur, un enseignant qui manipule la langue de Molière et celle de ses ancêtres Futankobes : LE POULAAR. Et contrairement aux pensées de plusieurs savants et intellectuels racistes, Mourtodo écartait toute idée selon laquelle une quelconque culture était, par essence, supérieure à une autre.
Mourtodo avait une pensée claire et une compréhension limpide de l’Islam. Il était équilibré et vivait sa religion avec raison et pratique lucide et éclairée d’une réflexion féconde, évolutive et en cohérence avec la parole divine et le comportement de notre prophète Mohammad. Il avait assimilé sans être assimilé. C’est cette attitude qui prévalait chez l’Homme lorsqu’il s’est agi de dénoncer nos tares sociales, nos fameuses et très injustes stratifications sociales qui, à bien des égards, étaient en contradiction flagrante avec les paroles divine et prophétique.
Toutes les cultures se valent, la différence se mesure dans le degré de piétés des hommes......aimait-il dire en citant la parole sacrée. Mourtodo, formé dans les écoles occidentales, est resté lui-même dans une identité culturelle loin de l’ambigu, identité qu’il défendra, mordicus, jusqu’au dernier souffle.
Il nous quitte. Il nous laisse orphelin. Il a mené notre combat jusqu’au dernier souffle. Il se battait pour l’émancipation de nos cultures opprimées, de notre humanite refusée et de notre dignité bafouée. Il militait pour l’enseignement de nos langues nationales marginalisées par les régimes racistes qui se sont succédé en Mauritanie, à l’exception de celui de Mohamed Khouna Ould Haidallah. Il militait pour l’égalité et le droit. Ce combat, il le mènera à l’intérieur de la Mauritanie et en France où il a longtemps vécu. Partout où il est allé, il organisera des conférences, des rencontres pour expliquer et convaincre de l’impérieuse obligation de se battre pour l’égalité des cultures et des langues qui en sont les supports. La culture fut son métier et l’unité nationale sa passion. Panafricaniste, admirateur farouche de Cheikh Anta, la vie de Mourtodo DIOP fut d’un apport immense pour l’enseignement des langues et la reconnaissance de nos cultures noires africaines ; sa mort est une perte immense pour la sous-région et l'Afrique entière mais aussi pour l’humanité. Dans un entretien que nous avions eu avec notre lui, il nous disait ceci : Une démocratie qui n’intégrerait pas une alternance culturelle restera pour longtemps fragile dans un pays comme le nôtre. » Fin de citation.
La mort de Mourtodo est une décision irrévocable parce qu’émanant de la sagesse suprême : Allah. Mourtodo nous quitte au moment où notre pays est encore étranglée par des fossoyeurs de toutes catégories. Il nous quitte au moment où la réconciliation nationale est dévoyée. Il nous quitte, hélas, au moment où la Mauritanie est encore dans un racisme toujours d’actualité, piégée qu’elle est, par une horde d’intellectuels et de politiciens pris et obnubilés par les détournements des deniers publics, la corruption, les assassinats, la drogue et bien sûr par les trahisons et autres déviations parfois innommables. En comparaison de ce que sont devenus la majorité de nos frères, l’ancien président de DEKALEM est un model de dignité, de morale et d’éthique difficile à égaler. Toute sa vie, Mourtodo DIOP travaillera pour mettre en phase la dimension culturelle avec le combat politique qui a fait de lui l’un des combattants les plus acharnés et les plus crédibles de notre paysage politique.
Avec la mort de Mourtodo Diop, la Mauritanie et l’Afrique perdent un Homme de culture d’une très grande mémoire, homme d’une rigueur intellectuelle et politique difficile à égaler. Il a été combattu et marginalisé dans son propre pays, dans sa propre société. Il l’a payé au prix fort à l’image des grands hommes qui ont marqué l’histoire de l’humanité.
Il nous quitte GRAND car lui n’a jamais accepté de monnayer le combat au service d’intérêts personnels et égoïstes. Mourtodo a refusé d’être aveuglé par l’argent, les villas et les luxueuses voitures qui inondent notre pays. C’est pourquoi nous disons honneur à Mourtodo qui a vécu, toute sa vie, en s’inspirant de celui qu’il aime toujours cité, le prophète Mohammad Ibn Abdoullah Ibn El Moutalib. Il a vecu humble, pauvre de ressources et de biens mais GRAND. Il a vecu avec des moyens limités mais des ressources «clean». Sa vie est une ECOLE pour ceux qui sont convaincus et ceux qui ont BIEN COMPRIS son message. Il fut un MODEL et nous sommes témoins oculaires de sa grandeur. Il fut et il restera la mauvaise conscience des bandits et autres hypocrites qui peuplent notre paysage politique car Mourtodo pouvait bien, à l’image de ces derniers, s’enrichir, se taper des villas somptueuses. Il en a eu toutes les opportunités mais il optera pour UNE MORT DIGNE et POUR UNE VIE PLEINE ET RICHE.
Dans un pays où la loi sociétale qui mesure la «REUSSITE» veut que tout «intellectuel» ou «politicien» qui n’est pas riche est passé à coté de l’objectif, des Hommes comme MOURTODO DIOP, sont D’UNE TRES MORALITE RARE car ils nous a laissé un BIEN PLUS PRECIEUX que les richesses, à savoir les idées nobles, celle de l’émancipation, de l’Education, de l’Honneur, de la Dignité, de l’abnégation mais aussi et surtout du combat pour l’application des valeurs universelles de Droit et de justice intra générationnelle et intergénérationnelle.
Qu’ALLAH réserve à Mohamadou Samba DIOP dit Mourtodo le Paradis.
Adama NGAIDE dit Ibrahima. USA. New-York.
En définitive, notre souhait est que notre génération ne passe pas son temps à pleurer ceux qui sont morts dans la dignité mais elle se doit d’aller puiser l’enseignement laissé par ces Hommes de dignité pour d’une part, perpétuer leur combat, et d’autre part, construire enfin, la conscience nécessaire au combat contre l’injustice et la barbarie qui sévit en Mauritanie.
Site AJD/MR