Dans l’ensemble, j’ai trouvé les installations un peu faibles par rapport aux années précédentes.
La Galerie Eva Presenhuber, de Zurich, présente l’installation
“Fosbury Flop” (2009) de l’artiste suisse
Valentin Carron, une gigantesque croix en bois qui soulève des questions quant à la sublimation des objets symboliques que l’artiste trouve dans son environnement immédiat. Cette croix est une sculpture publique à laquelle se mêlent des connotations religieuses universelles, mais elle représente aussi, avec ses deux lignes entrecroisées, un relief abstrait qui renvoie à des
stratégies artistiques abstraites. Pointant vers le ciel rougeoyant à la sortie du vernissage, on peut y trouver un côté romantico-nostalgique.
A la fois objet d’art et oeuvre d’art, l’installation “AIDS sculpture” (1989) évoque la fin des années
80 et le début des années 90, qui ont vu l’épidémie de sida faire partout la manchette des journaux. La sculpture en métal laqué atteint presque deux mètres de haut. Elle a été réalisée en 1989 par AA Bronson, Felix Partz et Jorge Zontal, des artistes qui appartenaient au groupe General Idea (présenté par Esther Schipper, Berlin; Galerie Mai 36, Zurich; Galerie d’Art Contemporain Frédéric Giroux, Paris) – à une époque où peu d’œuvres d’art avaient spécifiquement pour objet le sida. Inspiré par l’oeuvre célèbre de l’artiste américain
Robert Indiana, General Idea a remplacé le mot LOVE traduit sculpturalement, par le mot AIDS, en comprimant les lettres sur deux rangées, à l’intérieur de contours formant un carré parfait. Exposée dans divers lieux depuis 1989, la sculpture a été recouverte au fil de ses pérégrinations d’une épaisse couche de graffitis qui sont devenues partie intégrante de l’œuvre, et que l’on rencontrerait plus facilement dans une banlieue que sur la sélecte place de la Foire.
Mark Handforth (Galerie Eva Presenhuber, Zurich) a intégré dans son installation “Platz” (2007)
des maillons de chaîne de taille gigantesque qui s’entrelacent et composent une forme quasiment organique. Dans son installation sculpturale, Handforth déplace des objets familiers dans un environnement inconnu pour montrer d’une nouvelle façon comment ces objets existent et fonctionnent dans notre vie quotidienne. Il les représente ainsi métamorphosés dans une nouvelle forme d’allégorie physique. Cela fait penser la gourmande que je suis à un gigantesque sorbet mangue-framboise.
“Loop Bench” (2006) de l’artiste danois Jeppe Hein (Johann König, Berlin) est une oeuvre inspirée d’un simple banc public dans sa forme initiale. De taille absurdement surdimensionnée, le banc forme une longue boucle constituée de bancs avec des lignes croisées et courbes sur lesquelles
le visiteur peut s’asseoir. Ce banc possède en même temps sa propre qualité sculpturale. Son trait caractéristique repose sur la réaction ou l’interaction qu’il suscite de la part du spectateur, et sur la manière dont cette réaction se propage et place ainsi l’installation au centre de rencontres inopinées. Selon l’heure il est tristement vide, mais surtout dès que le soleil pointe et que le public afflue il prend toute sa fonction de possibilité de communication.
Je m’y suis posée en observatrice, je constate que les contacts entre les personnes se font plus facilement en virtuel qu’en live. Brassens était dans le vrai pour les amoureux, mais pour les solitaires point de salut, dans la vie réelle.
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