Levé de soleil sur Punta del Diablo
Punta del diablo, Cabo Polonio, Montevideo et Colonia, Uruguay
Quand je parle ça fait de la boucane. Il fait froid comme un automne avancé à Québec. Le bus nous laisse à 5 heures du matin au milieu de nulle part, dans ces zones du Monde que l'on appelle des frontières.
Chuy est une ville où vaut mieux ne pas traîner trop longtemps, mais c'est le seul endroit avant des kilomètres où il est possible de retirer de l'argent. Possible étant un très grand mot. Nous n'avons le choix d'y passer la journée attendant l'ouverture de la seule banque qui prend Visa, et comme vous le savez, les banques ne sont guère des lève-tôt. Nous attendons tout de même le levé du soleil pour s'y rendre, tuant le temps autour d'un foyer bien chaud que nous offrent les gentils douaniers uruguayens, une race à part.
Chuy, c'est chewy. Chewy comme quand tu manges un sandwich au poulet et que tu pognes par surprise un bout de cartilage. Non, c'est pire. C'est comme quand tu manges une feijoada au Brésil et que tu sors de ta bouche quelque chose qui ressemble à un bout de poche de porc les poils bien raides que tu pourrais te brosser les dents avec. À Chewy, c'est comme ça. Les chiens errants ont en moyenne 3.4 pattes et des maladies de peau. Le camion de vidange est une charrette tirée par un vieux cheval pas très vapeur. Il fait froid, c'est gris, c'est triste et le seul endroit où ça sent bon c'est dans la boulangerie. En face, c'est le guichet et à côté, le gars qui tient une barre de fer et qui demande 10 pesos - double clin d'œil - à un Québécois que nous rencontrerons plus loin dans l'histoire.
Bref, n'y allez pas.
Ceci étant dit, le sujet de la chronique d'aujourd'hui est l'Uruguay, l'oublié. Le petit pays entre les deux gros ; celui qui n’est même pas nommé dans le titre du Lonely Planet, le subtil et discret moustachu.
Je ne sais pas pourquoi on a décidé d'y aller, probablement parce que la plupart des voyageurs croisés sur la route nous disaient de passer notre tour car c'était ennuyant et qu'il n'y avait rien à faire.
On avait envie de voir de nos yeux, que nous ouvrons car c'est notre arrêt. Nous descendons ici à Punta del Diablo en pleine nuit à 18h00. Ici, le soleil est paresseux. Peut-être n'a-t-il pas envie de rayonner que pour quelques touristes hors saisonniers qui se pointent dans un village de plage en plein hiver ? Drôle de plan, mais je n'aurais pas demandé mieux. Le village est désert, presque tout est fermé, on a l'endroit pour nous seuls et c'est génial. Il n'y a rien à faire, c'est vrai. À moins que marcher sur de longues plages désertes vous intéresse ? Ou bien, regarder le levé de soleil sur les bateaux de pêcheurs ? Ou tout simplement profiter du vent marin frais et pur ?
Si la réponse affirmative vous fait envie, vous aimeriez sûrement Cabo Polonio. Nous y sommes arrivées encore en pleine nuit, à 19h00, à l'entrée des dunes qui séparent le village du reste du Monde. On cogne à une porte pour demander comment faire pour se rendre au « downtown » à une heure pareille ? La gentille dame nous répond qu'il faut aller là, où vous voyez une petite lueur, et acheter un passage en 4X4.
Prêt à tout, un Uruguayen prenant place dans le même véhicule nous demande si nous connaissons l'endroit pour arriver aussi tard. La réponse étant non, et lui apprenant que nous avions l'intention de camper sur la plage, d'un rire sympathique il nous dit qu'on est fou.
Alex, sur lesdites dunes
Justement, le camion doit passer par la plage en fin de trajet, et le vent glacial nous convainc de nous trouver un endroit plus chaud où dormir.
Le même homme d'une amabilité nous accompagne partout dans le village (5 minutes à pieds d'un côté à l'autre) nous faisant visiter l'endroit et demandant à Pancho de nous ouvrir une chambre dans son hostel éclairé à la chandelle. Le prix n'inclut pas le déjeuner, mais Pancho nous offre rapidement un verre de vin, de rhum, « un porro amigo » ?
Cabo Polonio est un endroit particulier. Quelques habitants entassés sur une pointe sablonneuse au bout de laquelle se trouve un joli phare, l'un des seuls bâtiments à avoir l'électricité. L'endroit est un refuge pour la deuxième plus grande colonie de loups de mer, soit 150000 bêtes éparpillées sur 4 îlots et au pied du phare.
Écoutez, je n'en dirai pas plus. L'Uruguay est à découvrir. Certes, ce n'est pas spectaculaire. Montevideo est une ville parmi tant d'autres, Colonia c'est un peu joli, mais que se sentir bienvenus toutes les minutes dans un pays est un sentiment qui vaut bien des Machu Picchus. Les Uruguayens sont les gens les plus aimables que j'ai eu l'occasion de rencontrer. Tellement gentils, sympathiques et serviables, que juste aller à l'épicerie en est émouvant.
Allez voir, ça vaut le coup.
Ah oui, le Québécois plus loin dans l'histoire, c'est un gars qui est débarqué par hasard à la même auberge que nous. Et justement, j'avais deux sachets de sauces brunes dans mon sac… Une p'tite poutine mon ami ?
-Will