Les écologistes en ont rêvé. Le gouvernement projette de la réaliser. Jean-Louis Borloo et Christine Lagarde, ont ouvert mercredi 10 juin la phase de concertation avec la présentation d’un Livre blanc sur le sujet. Pas question de qualifier le dispositif de”taxe carbone” fiscalement trop stressant mais plutôt de “contribution climat énergie” (CCE). A l’origine de l’idée, la fondation Nicolas Hulot rappelle que le principe consiste à réduire les impôts sur le travail et à les faire basculer sur l’énergie.
Une “révolution fiscale” a jugée Michel Rocard chargé d’animer une table ronde sur ce thème les 2 et 3 juillet prochain.”La chose n’est pas simple dans un pays qui déteste les réformes fiscales et ne les accepte qu’infinitésimales et marginales”, a fait valoir l’ancien Premier ministre.
“C’est bien à prélèvements constants que nous concevons l’exercice a insisté Christine Lagarde, gardienne de l’orthodoxie Sarkozyste qui s’est engagée à compenser la CCE par la baisse d’un autre prélèvement.
Le principe de neutralité fiscale est “simple mais trompeur” estime le Syndicat national unifié des impôts (SNUI) : si l’écotaxe est efficace et modifie le comportement des consommateurs, elle va réduire à terme le niveau de ressources publiques. Si elle ne l’est pas, elle risque de provoquer un transfert de charges de certains contribuables vers les ménages les moins aisés.
Un principe simple mais des modalités complexes. La conférence de consensus de juillet prochain réunira experts, associations et syndicats pour définir la CCE et plancher sur sa mise en place. La réforme suppose d’établir préalablement un bilan carbone pour chaque catégorie de produits. Le dispositif nécessitera plusieurs années de rodage, anticipe l’ancien Premier ministre.
La fondation Nicolas Hulot propose de redistribuer le produit de la taxe sous forme d’une allocation climat annuelle pour les particuliers et de compenser avec un abaissement des charges sociales pour les entreprises. Au total, cela devrait générer un flux d’argent circulaire d’environ 8 milliards d’euros par an, un “cercle vertueux” qui aurait pour but de dissuader l’achat d’énergie fossile.Gérer c’est prévoir. Pour Benoît Faraco coordinateur “changements climatique et énergie” à la Fondation Nicolas Hulot. “Le but est de préparer la hausse du prix de l’énergie qui, de toute façon, est inévitable.”"Nous n’allons pas attendre que le pétrole atteigne 200 dollars le baril pour réagir”. La CCE est loin de rentrer en vigueur tant les obstacles qui parsèment son chemin sont nombreux dans un contexte particulièrement difficile où les poches des particuliers et les caisses de l’Etat sont vides. Pouvait-on pour autant faire l’économie de la réflexion ? Assurément non.
Poser le problème, c’est quelque part commencer à y répondre et à s’interroger sur notre l’orientation consumériste de notre société. La démarche française est d’autant plus intéressante qu’elle emprunte un chemin radicalement différent de celui d’une régulation de la pollution par la constitution d’un marché des droits à polluer, qui existe en Europe depuis 2005 pour les industries les plus gourmandes en énergie.
Contrairement à la deuxième, la démarche CCE donne à l’acte d’achat un sens politique faisant ainsi du consommateur un acteur sur l’évolution du monde. Une véritable révolution. La Suède, qui a mis en place une fiscalité carbone depuis 1991, a indiqué mardi qu’elle recommanderait aux autres pays de l’Union européenne, dont elle assurera la présidence à compter du 1er juillet, d’adopter une démarche en ce sens.
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