Est-ce une exposition ? Un scénario ? Une démonstration, une mise en valeur des lieux ? Un faire-valoir du catalogue raisonné ? L’exposition de Philippe Parreno au Centre Pompidou (jusqu’au 7 septembre) est difficile à appréhender. Certes, l’espace est bien mis en valeur, avec cette ouverture sur la rue, les rideaux qui montent et qui permettent aux passants de voir l’exposition en mode off (quand la vidéo démarre, les rideaux se baissent), et le son de la rue qui parfois pénètre dans le musée. Certes il y a des objets, arbre de Noël, peinture murale fluorescente, mannequins à brandir (les affiches les plus vendues à la librairie, best-off populaire, effigies avec lesquelles des enfants périodiquement vont parader; No More Reality : ci dessus, l’artiste au travail), ballons au plafond qui sont des bulles sans paroles, des slogans vides reflétant le rouge de la moquette (Speech Bubbles, ci-dessous). Certes il y a un projecteur énorme et un écran tout aussi énorme : on est dans le noir, on attend le début de la séance, toute une mise en scène un peu dramatique.
Le film ? un vieux train lent, un anti-TGV, des gens endimanchés qui le regardent passer, ôtent leur chapeau, semblent recueillis. Le bruit du train est omniprésent. C’est l’été, la campagne, l’Amérique profonde, sa pauvreté et son étroitesse. L’atmosphère est grave, pesante malgré le ciel bleu et les couleurs estivales. C’est la lenteur surtout qui frappe, lenteur des gestes, du train, comme si le temps s’était arrêté. Il faut lire l’explication pour savoir qu’on est le 8 juin 1968, entre New York et Washington sur des voies de traverse et que ce train transporte la dépouille de Robert Kennedy, assassiné deux jours plus tôt. Le spectacle est dans le train et nous (cinéaste embarqué) regardons ceux qui nous regardent, nous filment et nous photographient.
Qu’en penser ? Que Parreno est rétif à l’idée d’exposition (cette ‘rétrospective’ va s’étendre dans trois autres lieux, à Zurich, Dublin et près de New York), que nous n’avons ici qu’une trace, qu’un scénario réticent, et que, si vous voulez mieux connaître Parreno, mieux vaut acheter l’excellent catalogue fait par Christine Macel, qui reprend l’ensemble de son travail, liste toutes ses vidéos et alimente une réflexion sur son oeuvre autrement plus fructueuse.
Photos de l’auteur.