Et le reste est d'une intelligence indéniable. L'écriture est toujours aussi pop, mais le trio assène leurs sons comme les orateurs des traits d'esprits. Le résultat ne ressemble à pas grand-chose de connu, si ce n'est les productions les plus pop de Pharrell Williams peut-être, pour Kelis ou Gwen Stefani... avec plus de finesse et de malice. Percussions, voix et claviers sont les principaux matériaux de production. Minimalisme et lignes claires les seuls mots d'ordre. Soyons radicaux! Comme l'an passé avec l'album de Lykke Li, Björn Ytlling fait d'un album pop un objet plastique au design extrêmement soigné. Celui de son groupe est seulement moins rond, plus anguleux et acéré que celui de sa protégée.
J'avais lu l'album précédent Seaside Rock comme une petite pause ludique, au cours de laquelle le trio s'amusait avec ce qu'ils savent faire, sans hésiter à s'éloigner de la pop façon Peter Bjorn and John, ou des canons de la pop suédoise, ce qui revient au même. C'est drôle comme Peter Bjorn and John ont accompagné l'évolution de la pop suédoise au cours de cette décennie. Leurs premiers albums étaient encore emprunts des guitares et des mélodies sucrées des années 90, celles de la pop des Cardigans ou des Wannadies. En 2006, le parfait Writer's Block était alors le meilleur représentant d'une nouvelle « suédicité » : écriture parfaite, production parfaite, popsongs où la mélancolie se dissimule sous la joie.
Aujourd'hui, Peter Bjorn and John joue de la mutation électronique de la pop nationale. Au lieu d'user de clavier denses et de belles voix comme Kleerup, ils rabotent, avec une précision incroyable, le son jusqu'au squelette. Ce squelette pourrait alors être emprunté à la danse macabre de la vidéo d'"Around The World" de Daft Punk, tant le son (et le travail qu'il cache) est impressionnant, et tant il amuse la galerie. Et pourtant,... je suis déçu. Writer's Block, l'album du succès, malgré une forme plus convenue, reste au-dessus. Parce que l'intérêt des blagues, même les plus longues, est toujours trop court. Et les quelques « ballades » de Living Thing (même la délicieuse petite pièce de "Blue Period Picasso") n'arrivent pas à atteindre l'émouvante beauté des mélodies de Writer's Block, comme si ce nouveau son restait imperméable à l'émotion. « It's a living thing! It's a living thing! » Saluons tout de même l'audace, le meilleur des moteurs.
En bref : après le succès du beau Writer's Block, Peter Bjorn and John continuent de céder à l'amusement ; et ils ont bien assez d'intelligence et de maîtrise pour en faire une œuvre pertinente d'electropop ultra précise, à travers laquelle bien peu d'émotion passe malheureusement.
Myspace et site officiel.
Le nouveau single "It don't move me":