Magazine Livres
Laurie Colwin: Frank et Billy
(Poche, 188 pages, traduit de l'américain par E. Marciano)
Faut-il avoir honte de ses lectures? J'ai lu Frank et Billy de Laurie Colwin et j'ai aimé!Disons plus exactement que je me suis délectée à cette lecture, comme avec un bonbon acidulé, c'est bon, puis on oublie et on passe à autre chose! Sans prétention mais avec reconnaissance. Les petits riens "et autres plaisirs minuscules" ont une grande importance dans la vie stressante d'une lectrice qui se voudrait aussi blogueuse compulsive! On ne peut pas non plus se contenter uniquement des chefs d'oeuvre! Il y a le Mont-Blanc qu'on escalade une fois dans sa vie et la petite voie communale indispensable au déplacement quotidien!
Bref, j'ai bien aimé ce livre choisi pour la romancière elle-même, connue grâce à :"Une épouse presque parfaite" que j'avais aussi bien aimé et malgré l'horrible couverture rose , vulgaire et ambiguë qui se veut accrocheuse et qui, à mon avis, ne correspond pas du tout à l'histoire, beaucoup plus pudique et discrète, juste une petite musique acerbe et douce à la fois!
Une histoire à l'eau de rose, diront certains? Mais non, pas vraiment, pas tout à fait! Ou alors à la façon d'une chanson tendre et un peu triste, qui finit comme la vie, on ne sait encore trop comment, car c'est la vie justement et elle s'écoule sans cesse et on ne peut l'arrêter, alors il n'y a pas vraiment de fin, ni heureuse, ni malheureuse, la vie suit son cours, c'est tout et c'est déjà une autre histoire! ! On est très loin des romans policiers avec des rebondissements à chaque page!
Minimaliste, diront d'autres encore? Sans doute! Il ne se passe pas grand chose de trés important, mais une foule de détails justes, inattendus, drôles ou ironiques nous permettent de mieux cerner les personnages. Ceux-ci vivent une relation adultère malgré le mariage réussi de chacun.Tout les sépare cependant, à commencer par leurs goûts et leurs tempéraments totalement opposés.Frank vit cet amour de façon heureuse et naturelle, tout en s'amusant de leurs différences mais Billy, elle, le vit mal et rompra au bout de deux ans. Ils se retrouveront un jour, par hasard, l'instant de quelques paroles échangées, chacun accompagné de son fils, l'un adulte, l'autre nouveau-né. Le lendemain Billy racontera cette rencontre à sa meilleure amie: "Quand je pense à lui, c'est toujours au passé, mais quand je l'ai revu, je me suis rendu compte à quel point ces choses sont vivantes, même lorsqu'elles ont cessé d'exister. Les flots ne se referment pas sur ta tête. En tout cas pas sur la mienne. je m'aperçois que, quoi qu'il arrive, Francis est indélébile. Il fait partie de mon expérience, comme la visite de Stonehenge ou un voyage en Inde. Elle baissa la tête et s'aperçut qu'elle avait endormi William à force de le balancer. (...) Il grandissait si vite qu'il semblait s'évaporer avant qu'elle ne puisse s'habituer à lui."
Voilà le ton! Le style, je ne sais pas: c'est une traduction!
Je reprendrai bien de cette lecture, un jour de grande légèreté par exemple. L'avis de Clarabelqui m'a fait connaître Laurie Colwin, ce dont je la remercie.