C’est la vie rêvée d’une ancienne critique de cinéma : elle n’a pas de nom dans le roman. Elle est juste bouchère, la bouchère ! Son idéal, son point d’ancrage, son rocher de secours dans la vie, c’est sa boucherie qu’elle a acquise avec l’aide de son ex-mari qui s’est ensuite éloigné d’elle. Elle est seule, sans famille, sans ami, sans enfant, sans animal domestique. Sa vie, c’est d’être dans sa boutique parisienne, à débiter de la viande pour ses nombreux clients. La seule présence à ses côtés est un jeune commis Patrice, silencieux et mystérieux mais avec lequel elle s’entend bien malgré ses retards matinaux. Bientôt, son commerce marche si bien qu’elle demande une aide. Arrive Myriam, une femme âgée très compétente qui s’impose d’emblée, mais qui, elle aussi, se révèle très silencieuse. Un jour ils iront tous les trois visiter un abattoir,le lieu du sacrifice par excellence. Dès lors, tout va changer. Ils commencent à parler et la fin tragique arrive en accéléré.
J’ai bien aimé. C’est un livre très maîtrisé, aux thèmes et aux personnages surprenants. Si la boucherie semble un lieu sacré,ce n’est en réalité qu’un prétexte pour donner une raison de vivre à ces trois vies tragiques, ces trois êtres solitaires et secrets aux existences si fragiles. Trois êtres qui flanchent, se relèvent, s’accrochent les uns aux autres tour à tour. Tout nous est dit, minutieusement décrit quant autravail dans une boucherie, les viandes, les couteaux, l’approvisionnement, les horaires, les clients, les moments d’attente. Un peu longs peut-être, ces passages ? Rien ne pèse cependant. Tout est simplement dit, sans fioritures. Un livre agréable à lire.
Je n’ai trouvé qu’un seul blog qui en parle aussi : celui deClarabel,en 2006
Bouchère de Catherine Soullard, roman, Calmann-Lévy, 173 pages, septembre 2006
Catherine Soullard a été productrice à France Culture pendant quinze ans : critique de cinéma, elle est l’auteur de Palmito d’Evian, paru en 2005.