Je me suis égaré dans de nombreux lieux de la capitale dernièrement, à la recherche guerrière d’un talent indiscipliné et caché. Une démarche il est vrai bien utopique car malgré ma détermination acharnée, c’est bien seul que je rentre. Quelque peu résigné, plutôt très fatigué, je décide de revenir à la source même du critique. Insérer un putain d’album. Ecouter et juger. Une sensation étrange de réalité. Et surtout de liberté. Car subir me révolte. La toute puissance du bouton stop.
De l’or noir
Symbole d’une culture qui refuse d’abdiquer, Crystal Stilts explose de justesse et de génie. Partant de leur seul album Alight of the Night, je découvre ébahi la toute puissance d’un psychédélisme flouté par un garage hargneux, pétri dans son écrin d’argent minimal et brumeux. Une sorte d’amalgame grandiose bousillant le consensus new-yorkais et redonnant vigueur à un Rock lâchement délaissé au profit d’une post-pop bien trop mièvre. Un synopsis sans cadre, des Warlocks au Brian Jonestown Massacre. On navigue de pub en pub, la bière qui coule, le regard qui tombe et l’air fier de soutenir un groupe encore sincère. De son humble utilisation, le clavier délivre des morceaux parfois aigris dans leur labeur noir charbon (Bright Night, The SinKing) et purge l’or, tout aussi noir, au fond du caniveau (Prismatic Room, Crystal Stilts). La beauté, elle, peut s’écouter et s’apprécier. Elle laisse entrevoir la profondeur vocale de Brad Hargett et sa simplicité touchante (The City in the Sea). Sublime.
Car mon fils, tu ne pécheras plus.
Crystal Stilts ouvre ses longs bras maigres pour accueillir le déchu parmi les déçus, moi et ma pauvre carcasse, les pieds qui saignent dans des Repettos troués, abusé par une moralisation moderne du dégout et une acceptation dépressive du répugnant. Pas de jugement non. Juste le regard annonciateur de déluge. Crystal Stilts, apôtre des temps modernes, gourou maudit, guide abusé, tête baissé, je te suis, les yeux fermés. Car tu es la voix qui a su s’élever et appuyer sur ce maudit bouton stop. Et me montrer enfin, le chemin à ne pas emprunter.