On dit que les peuples qui la composent ne s’intéressent pas à l’Europe .
Ce n’est peut-être pas qu’ils ne s’intéressent pas à l’Europe , mais plutôt qu’ils se méfient de ce qui leur en est dit ou de ce qui est écrit sur le sujet. Il faut dire que si les financiers, politiques et techniciens se sont maintes fois rencontrés pour énoncer et rédiger les traités qui fondent l’Europe contemporaine, les peuples, quant à eux, je veux dire nous, vous, nous tous, les petites gens de la vraie vie, les peuples donc, ne se sont eux jamais véritablement rencontrés …en dehors des corps à corps cyniquement imposés.
Certes l’Auberge espagnole a permis d’initier un avenir plus serein. Les étudiants se sont frottés aux cultures des uns et des autres. Ils se sont mêlés, voire mariés entre eux. Ils porteront peut-être l’Europe harmonieuse de demain…
Mais, j’en reviens aux peuples et au présent. J’en reviens à tous ces gens dont la démocratie a besoin pour fonder sa légitimité. Sans eux, sans leur participation aux scrutins, l’image de bienséance de nos systèmes politiquement corrects s’évanouit. Or, ces gens-là n’ont pas eu l’envie de voter dimanche .
Qui, désertant les palais, initiera le nouveau programme ERASMUS pour une population de tous les âges? Qui affrêtera les trains, les charters, les autobus? Qui fera s’ouvrir les portes des maisons, les halls des HLM, les jardins ouvriers de Versailles,
les parvis des usines, les parkings des cathédrales? Qui fera s’échanger la musique des fanfares, le rôti du dimanche, la pasta vongolese, la truite au raifort et la goulash hongroise? Qui logera l’ouvrier de Dansk chez le chômeur de Villeurbannes, le pêcheur de la Baltique chez l’insurgé breton? Qui fera écrire et dans quelle langue l’Europe partagée des peuples?
En voilà une question ridicule!
Mais nous en reparlerons.