Je ne sais pas si vous savez, mais je suis un grand amateur de romans de voyage. Je ne sais pas trop à quoi ça tient, étant donné que je suis de tendance plutôt casanière, n'ayant posé les pieds dans le treizième arrondissement qu'une ou deux fois, par hasard, depuis le début de mes études de chinois. Mais bon, c'est peut-être là que se trouve la raison. Ou alors c'est que mon papa m'en abreuve depuis que je suis capable de ne pas lui dire « pfff mais j'en veux pas de tes bouquins tout pourris » (1).
Donc, les récits de voyage me transportent. Ce qui est plutôt rassurant, pour des récits de voyage. Et du coup, comme ces jeunes hippies baroudeurs qui ne cessent de t'asséner leurs « han mais t'es jamais allé au Malawi ? Ou au Qatar ? », ou pire, les collègues de mes parents qui n'ont de cesse de raconter les anecdotes de leur vie d'expatriés en Afghanistan ou je ne sais où, bé moi, je fais pareil avec mes lectures de romans de voyage.
« Quoi ? T'as jamais lu Nicolas Bouvier et son «Usage du Monde » ? Ptain tu sais pas ce que tu rates, le gars, il est allé de Serbie en Afghanistan en voiture dans les années 50, en deux ans, avec un pote peintre, ils s'arrêtaient dans un pays quand ils avaient plus d'argent, un truc de fou, on pourrait plus faire ça aujourd'hui ! », et si les gens connaissent, je me retrouve bien embêté, parce qu'en fait, j'ai beau être amateur de romans de voyage, c'est un peu tout ce que j'ai lu (2).
Enfin, jusqu'à aujourd'hui, ce glorieux samedi où, à la sortie de mon partiel de chinois classique (oui, pleurez, pleurez sur mon sort de malheureux étudiant, obligé de traduire du Confucius un samedi après-midi), j'allais chez mon libraire pour tenir la promesse faite à mon papa de ne pas acheter de BD avec les sous qu'il me donne et prendre Motel Blues, de Bill Bryson.
Cet article lui sera donc consacré.
Alors, me direz-vous, pourquoi tourner ainsi autour du pot, tu vas la cracher ta Valda (3) à quoi sert cette introduction de deux kilomètres qui ne présente pas le moindre intêret ?
Hé bien, tout d'abord à ne pas déparer sur mon blog, qui n'accepte que les articles d'une certaine longueur parce que ça fait intello, et ça ça attire les filles à lunettes, et ensuite, à ne pas déparer de la suite de l'article qui ne saurait présenter beaucoup d'intérêt, vu que je n'ai lu que 40 pages de ce bouquin.
Pourquoi diantre faire un article sur un bouquin qu'on n'a pas lu, alors ?
Il y a deux raisons à cela.
La première est que ça me permet de repousser un peu le moment où je continuerai, parce que jusqu'ici, c'est quand même vachte bien. La seconde est que rien que ces quarante pages valent largement tout ce que Marc Levy et Guillaume Musso ont pu produire à eux deux. D'ailleurs, je ne sais même pas pourquoi je les nomme. Peut-être que ça attirera du monde sur mon blog, tiens.
Bref. Motel Blues, c'est le récit d'un enfant de l'Amérique profonde. Pas de n'importe quelle Amérique profonde, de l'Iowa. De Des Moines, plus précisément. Un enfant qui a tout fait pour en partir, et qui y revient, et nous la décrit, avec une tendresse désabusée pour ses habitants désoeuvrés, pour qui une soirée dans un bowling aux pistes tordues et aux boules fêlées suivie d'une glace au chocolat en lisant Playboy est ce qui se fait de plus excitant dans l'année.
Ce pourrait être déprimant. Le pays et ses gens s'y prêtent. Des champs de maïs à perte de vue, interrompus par des silos à grains, et des péquenots à casquette John Deere et à la nuque crevassée.
Sauf que.
Bill Bryson a un humour féroce, qui attaque sec dès les premières lignes (4), avec un sens de l'observation digne de Pratchett (5). Et jusqu'à la page 40, le rythme a beau être lent comme une journée de voyage en voiture au milieu des champs de maïs, on (enfin, je) se surprend à sourire comme un con dans le métro au milieu des gens qui font la gueule.
Et ça, c'est précieux, et c'est pour ça que je ne veux pas finir ce bouquin trop vite.
-
Ce qui fait assez longtemps, mine de rien. Je n'ai jamais été particulièrement rebelle, même à 14 ans je le laissais dire « Donne la main à papa » dans le supermarché. En fin de compte, je me demande si j'ai été bien élevé.
-
Dont je me souvienne à cet instant, après une soirée bière-sangria pour fêter la fin des écrits. Mais y'en a sans doute d'autres.
- J'aime bien cette expression, je l'avais jamais placé en 378 notes de blog.
- « Je suis né à Des Moines. Ce sont des choses qui arrivent. Quand on naît à Des Moines, ou bien on accepte la situation sans discuter, on se met en ménage avec une fille du coin nommée Bobbi, on se trouve du travail à l'usine Firestone et on vit là jusqu'à la fin des temps ; ou bien on passe son adolescence à se plaindre à longueur de journée que c'est un trou et qu'on n'a qu'une envie, en partir, et puis on se met en ménage avec une fille du coin nommée Bobbi, on se trouve du travail à l'usine Firestone et on vit là jusqu'à la fin des temps. » Pour être honnête, je n'avais pour but que de vous faire lire ces lignes en espérant vous donner envie de lire le reste, j'espère que vous êtes allés jusque là.
- C'est pas peu dire.