Détenu sans aide et sans support
Ce texte a été rédigé par Jean-Pierre Bellemare. Détenu depuis 22 ans à la prison de Cowansville, l’auteur signe depuis 2 ans la Chronique du prisonnier dans la revue Reflet de Société. Il explique ici les difficultés qu’éprouvent les prisonniers de parler de leurs tourments intérieurs et l’incapacité pour eux d’obtenir de l’aide qui en découle.
Admettre ses erreurs
Il faut avoir suffisamment de lucidité pour d’abord reconnaître que nous avons un problème. Cela sous-entend que nous avons manqué de jugement en ce qui concerne nos limites à un moment donné. De s’admettre dépassé ou surchargé demande une humilité que nous les hommes percevons trop souvent comme de la fragilité, de la vulnérabilité.
Silence en prison
Pourtant, ce point de départ est incontournable pour avoir de l’aide. Au pénitencier, de s’ouvrir ainsi représente un véritable danger car plusieurs d’entre nous avons coupé les ponts avec cette fragilité intérieure que nous confondons avec notre vulnérabilité. Nos passés furent souvent des suites de drames qui nous ont exacerbés au maximum.
Les baguettes en l’air
À force de manger des coups, il devient normal de marcher avec les «baguettes en l’air» pour se protéger. Tristement, la vie nous apparaît beaucoup moins attrayante qu’elle ne devrait l’être et notre souffrance et notre malheur nous semblent alors être la norme.
Peur de se faire aider
L’amélioration et le changement deviennent presque impossible parce qu’avec les «baguettes en l’air» de manière défensive, nous maintenons en place des barricades empêchant toute aide extérieure de s’approcher.
Jean-Pierre Bellemare