Christian Saint-Étienne, membre du Conseil d’analyse économique, conseiller régional d’Île-de-France et conseiller de Paris du Nouveau Centre, explique pourquoi la zone euro peut exploser :
"Les écarts de taux d’intérêt sur les dettes publiques s’aggravent. Pour un emprunt à même échéance, si l’Allemagne paie 3 %, certains pays – Grèce, Irlande, Portugal… – paient maintenant 6% ! Tout se passe comme si les marchés financiers avaient déjà commencé à jouer l’éclatement de l’euro. L’élément déclencheur de la crise pourrait aussi venir des États-Unis. Qui décide de la parité euro-dollar ? C’est le Politburo chinois et la Réserve fédérale de New York.Les Chinois, en fonction de leurs objectifs, achètent du dollar ; ils ont acheté de l’euro quand ils ont voulu le faire monter ; quand ils ont baissé cette part dans leurs réserves, l’euro a baissé. Il est quand même hallucinant que cette parité, si importante pour nous, se décide en dehors de l’Europe. Un euro à 1,80 dollar est sans doute supportable quelques mois pour l’Allemagne, il ne l’est pas pour la France qui exploserait en vol, comme l’Italie. La chute du dollar exacerberait donc terriblement les contradictions internes en Europe. Or, si les États-Unis ne sortent pas rapidement de cette crise, compte tenu de leur conflit géostratégique larvé avec une Chine qui affiche des budgets militaires toujours croissants, ils n’hésiteront pas une seconde à provoquer la chute du dollar ; c’est pourquoi je sonne le tocsin ! [...]
L’euro n’est pas un bouclier, mais c’est un édredon ; il évite les crises monétaires ou les krachs bancaires comme celui qu’a connu l’Islande. À court terme, ça paye ! [...] Les pays qui gagnent en compétitivité le font aux dépens des autres. La moitié de la hausse des excédents de l’Allemagne est réalisée contre la France et l’Italie ; eux ont une politique de désinflation salariale compétitive, ils vendent en France où l’on a au contraire continué à augmenter la dépense publique. Dans le même temps,la France ne vend pas en Allemagne car la demande intérieure y est atone ! Berlin fait pourtant un très mauvais calcul à long terme en affaiblissant ses partenaires et en cassant la dynamique européenne…"