qui m’assassine dans ma race
chaque millénaire
et pousse
fagots de greffes
sur mon passage
qui donc remue mes racines
je me remémore
il n’y avait pas d’eau à l’origine
mais un roulis d’ergs comme une caravane flottante de continents
un tangage de dunes
il n’y avait que le tam-tam des mutations
une levée de carnassiers
et moi barde-crocodile
me délectant de lave
il n’y avait que la présence sulfureuse du feu
l’ail putride des hautes tensions
les crêtes fétides de saurienschaque jour
dans mon hibernation
je me remémore
la nuit avait obliqué
éteinte dans la spirale des flammes
une glaise élastique s’entassait sur mon front
des singes transhumants ricanaient
étais-je totem
menhir saharien
ou cette corporelle éclaircie de la foudre
Abdellatif Laâbi, Œuvre poétique I, la Différence, 2006, pp. 75-76
L’Anthologie poésies du cri est une proposition d’Alain Marc