Harkis, une vingtaine d’enfants de harkis présents aux débats…
Un débat sur la guerre d'Algérie et la colonisation française a eu lieu le Vendredi 22 Mai 2009 à 20h30 au muséum d'Orléans en présence de Monsieur Benjamin STORA, historien français.
Les axes principaux de ce débat étaient :
Les facteurs qui rendent l'écriture de l'histoire passée de la France et de l'Algérie allant de 1830 à 1962 ?
Mais aussi les enjeux politiques et économiques qui entourent l'écriture de cette histoire commune entre la France et l'Algérie, et quel est le degré d'implication de la classe politique dirigeante des deux pays ?
Monsieur Benjamin STORA, a exprimé la perception française de ce qu'il désigne comme « conséquence de la guerre », il a cité, pour la circonstance, l'un de ses ouvrages non publié en Algérie son livre ( La Gangrène et l’oubli ). Il interpelle sur la question du rapport de l'histoire et de la mémoire ainsi que de la confusion qui peut exister entre les deux.
Il démontre d'abord que l'Algérie était vue à l'époque comme un territoire français, et aussi comme le centre de l'empire colonial français. Elle pouvait aussi servir de base pour la décentralisation du pouvoir français, comme ce fut le cas durant la deuxième guerre mondiale. Cette guerre d'Algérie a permis un bouleversement considérable, une sorte de déchirure stratégique dans l'histoire du nationalisme politique français.
Car c'est tout au long de cette guerre qu'est née la cinquième République. C'est dire à quel point cet épisode marque durablement la vie politique et constitutionnelle française.
D'autre part, il met en évidence tous les facteurs perturbateurs, qui empêchent la société française d'avoir une vision apaisée de son histoire coloniale passée. Plus d’un million et demi de soldats français ont participé à cette expédition de la guerre d'Algérie. Ces hommes, aujourd'hui pour la plupart à la retraite, ont connu l'Algérie et ont été pris dans l'engrenage effroyable de cette guerre atroce au plan humain. Sans oublier toutes ces personnes déracinées, meurtries au plus profond de leur chairs de blessures inguérissables à jamais, ceux que l'on appelle les Pieds-noirs, sans oublier non plus les harkis victimes aussi d'un crime d'état de la part de la France et de l'Algérie complices.
Il ne faut pas oublier tous les immigrés algériens dont le nombre a doublé entre 1945 et 1962, qui font eux aussi partie intégrante de la mémoire française. C'est un paradoxe étrange de cette histoire, mais c'est un épisode qui indique l'enracinement profond de l'immigration algérienne en France. Cette période de l'histoire Franco-algérienne concerne, en France des groupes de personnes impliqués de part et d'autre du fait de la guerre, et ne peut être comparée a aucune autre décolonisation telles celles du Maroc, la Tunisie ou le Sénégal.
On peut estimer que quatre à cinq millions de personnes vivantes dans la société française ont un lien direct avec l'histoire de cette guerre d'Algérie. Le problème de la mémoire de cette guerre est quasi physique explique-t-il, citant l'historien français Raoul GIRARDET.
Monsieur STORA précise que la fin de cette guerre pour la France est une sorte de blessure narcissique du Nationalisme politique Français. Selon lui, le traumatisme de cette défaite a entraîné une stratégie d'oubli volontaire et pervers, construit par l’état autour des lois d'amnésie qui permettaient de ne pas punir les crimes de guerre, ( et l'état français en fait partie ) et ce jusqu'aux années 1990, marqués par l'éclatement du discours.
En effet, Monsieur Benjamin STORA estime que le changement du discours algérien ne sera pas sans conséquences sur la réécriture de l'histoire. Des langues commencent à se délier, des écrivains s'impliquent pour dire une certaine vérité (tels que Mohand HAMOUMOU, Nordine BOULAHIS et bien d 'autres ), des témoignages nombreux des acteurs encore vivants apparaissent et vont remettre en question l'histoire falsifiée de cette guerre et obliger la France et l'Algérie à lire et avoir une vision réelle d'une histoire commune de 1830 à 1962.
Si l'on veut aujourd'hui faire une analyse sociologique des classes dirigeantes algériennes depuis 1962, on constatera que ce sont
les élites qui ont été le plus en relation avec le colonialisme à savoir les principaux bénéficiaires de l'indépendance algérienne.