Petit déjeuner avec Mick Jagger
de Nathalie Kuperman
N'est-ce pas là l'image du refuge de la littérature ? L'adolescente, Nathalie, vit seule avec sa mère. Mais sa mère est-elle vraiment là ? N'est-elle pas elle-même perdue dans ses obsessions, son désespoir, échouée sur une plage d'incapacités ?
Tandis que la mère fuit mentalement leur vie, la fille s'invente un autre monde, un refuge qui laisse toutefois sa place au doute. Dans ses brèves hallucinations en effet Nathalie trouvera toujours la faille, le moment de s'interroger sur la loyauté des ses yeux, de sa tête. Mick Jagger dort dans la pièce d'à côté, elle lui prépare son café : mais est-il seulement vraiment là à ronfler tranquillement pendant qu'elle guète son amour ?
Mick Jagger comme confident, c'est tout de même énorme ! Mais au fond, il fallait quelque chose d'aussi insaisissable, d'aussi éclatant pour masquer l'indigne et l'inquiétant, tout en laissant la porte ouverte sur une réalité toujours présente, juste cachée, là, derrière le poster.
On retrouve chez Nathalie Kuperman ce rapport étrange à la mère, où la folie est à la fois objet condamnable, sujet de culpabilité et modèle de vie. L'auteur peint ce jeu « border-line » de la fille funambule, qui oscille sur son fil sans jamais pencher tout à fait à droite ni à gauche, sans jamais être acquise au ciel, ni promise à la piste.
Voici donc une introspection dans l'adolescence qui fait figure de haute voltige, et qui touche son lecteur dans le mil.