Les économistes s'alarment d'un risque de déflation en Europe. En mai, les prix à la consommation dans les seize pays de la zone euro ont stagné, sur 12 mois glissants. Pour l'essentiel, ce ralentissement de l'inflation est dû aux cours des matières premières et de l'énergie. Mais sur le fonds, un vrai recul généralisé et prolongé des prix nous entrainerait dans un cercle vicieux. Des prix qui baissent démotivent les entreprises à investir, les salaires n'augmentent plus, la consommation chute, etc.
Baisse des prix... et des salaires
En France, on attend une baisse générale des prix de détail avant l'été. En avril, l'indice des prix à la consommation n'a crû que de + 0,1 % en rythme annuel, un ralentissement jamais atteint depuis 1957. Les économistes seraient plus optimistes pour la France que le reste de l'Europe, et notamment l'Allemagne. Pourtant, la pression déflationniste sur les prix est réelle : les récentes manifestations des producteurs de lait rappellent les tensions du monde agricole, pressuré par la grande distribution et les industries agro-alimentaires. Dans l'immobilier, même l'ile-de-France que l'on croyait épargnée de la crise du marché pour cause de pression démographique a vu ses achats immobiliers s'effondrer de 42% au premier trimestre 2009 par rapport à l'année précédente.
Comme l'inflation en 2009 sera très basse, on s'attend à des revalorisations salariales très faibles pour 2010. Le SMIC lui-même ne bénéficiera d'aucun coup de pouce le 1er juillet prochain, comme l'avait confirmé Brice Hortefeux. Côté retraites, tous les coups semblent permis. Ainsi apprend-t-on que la la majoration de durée d'assurance (MDA) réservée aux mères de famille, instaurée en 1971, est menacée : elle permettait aux femmes salariées du régime général de bénéficier d'un bonus de deux ans par enfant, afin d'avancer leur départ à la retraite sans être pénalisées. Le gouvernement n'y est pour rien. Une Cour de Cassation a jugé que cette discrimination "positive" n'était pas valable. La semaine dernière, les députés UMP ont rétabli "à titre exceptionnel" l'Allocation Equivalent Retraite que Nicolas Sarkozy voulait supprimer dès le 1er janvier 2009. Crise oblige, le président français avait dû renoncer à supprimer cette allocation qui concerne quelques 68 000 personnes, pour un coût estimé à 150 millions d'euros, qui permettait aux salariés n'ayant pas atteint l'âge de 60 ans mais ayant suffisamment cotisé, de toucher leur retraite à taux plein.Reste à rétablir désormais la Dispense de Recherche d'Emploi (DRE), qui permet aux salariés de moins de 60 ans mais ayant cotisé suffisamment cotisé pour leur retraite d'éviter d'avoir à rechercher un emploi.
Et les pays pauvres ?
La semaine dernière, les représentants de 55 Etats, membres du "groupe pilote sur les contributions internationales de solidarité en faveur du développement", s''étaient rassemblés à Paris pour discuter de l'aide aux pays pauvres. Actuellement, l'aide publique internationale en faveur de la lutte contre la pauvreté dans le monde s'élève à quelques 80 milliards d'euros, une goutte d'eau par rapport aux besoins. On cherche de nouvelles idées, comme la taxe Chirac : "En 2008, la taxe "Chirac" sur les billets d'avion, en vigueur dans onze pays et qui prélève de 1 euro (classe économique et vol intérieur) à 40 euros (première classe et vol long courrier), a dégagé 300 millions de dollars, soit 82 % des fonds engagés par Unitaid, organisme international d'achat de médicaments, pour lutter contre le sida, la tuberculose et le paludisme."
La France apparaît plutôt timide sur une nouvelle taxe type "Tobin". Jeudi, les participants à la réunion de Paris ont parlé d'une taxe basée sur les changes, de 0,005 %, qui pourrait rapporter, au niveau mondial, entre 30 milliards et 60 milliards de dollars par an. La France en a voté le principe en 2001 et la Belgique en 2004. Jeudi, Bernard Kouchner avait avancé que la France se joindrait au groupe de pays "pionniers" pour l'instauration de cette taxe Tobin sur les mouvements de capitaux. Il détaille : "Notre pays, la France, est prêt à accompagner un groupe pionnier d'Etats pour appliquer ce type de taxe qui a déjà été votée dans notre Parlement en 2001. J'ai déjà proposé cela de nombreuses fois et à chaque fois tous les ministres des finances ont dit : 'Ce n'est pas possible', eh bien moi je vous dis : 'rien n'est impossible !'"
Manque de chance, il fut désavoué dès le lendemain par Christine Lagarde :"On ne peut pas procéder de manière solitaire dans ce domaine. (...) Ça ne peut fonctionner que si c'est étudié en profondeur et que si c'est accepté et mis en œuvre par tout le monde". La ministre des Finances raille le projet: "Vous savez, quand les ministres des Affaires étrangères se mettent à sortir la boîte à idées finances, on peut tout attendre."
On comprend une fois de plus les limites de la rénovation du capitalisme...&alt;=rss