Ce seul titre a suffit à me mettre de mauvaise humeur hier matin, face à tant de mauvaise foi (pas fait exprès !) car j’ai travaillé pendant plus de vingt ans dans le domaine de l’insertion sociale et professionnelle de ceux que l’on nomme pudiquement « personnes en difficultés », là où certains (mais je reconnais que ce n’est pas la majorité, ne soyons pas démagogues) n’ont d’autres problèmes personnels que la seule absence d’emploi. Des gens comme vous et moi, quoi.
Si j’étais en colère, c’est que ce brave Martin, qui a vendu son âme au diable, ne peut ignorer que sa mesure est inutile et coûteuse, et que cet argent là pourrait être bien mieux placé. Mais ce que Dieu veut… Même la sanction de la réalité ne saurait faire plier son obstination, on l’a bien vu sur d’autres dossiers, comme Hadopi pour seul exemple. Et, bientôt, le travail du dimanche… Comment fera Martin, pour aller à la messe ?
Plus sérieusement, ce plan était unanimement analysé dans mon milieu professionnel comme un moyen de forcer les gens à accepter des emplois de mauvaise qualité, surtout à temps partiel, dont personne ne veut (le temps partiel subi est une triste réalité, n’en déplaise aux défenseurs du travail du dimanche), qui ne créera en rien des nouveaux postes, contribuant donc ainsi à un phénomène déjà bien trop présent sur le marché du travail avant même la crise de précarisation généralisée, et qui de surcroît constituera un effet d’aubaine pour les employeurs peu scrupuleux… ou en difficulté eux aussi.
Découvrons ensemble cette réalité que Sarkozy ne veut pas voir, et qui présente systématiquement toutes les réformes antisociales comme des avancées incroyables :
En France, on pouvait constater en 2008 :
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3 millions d’allocataires des minimas sociaux, mais 6 millions de personnes qui vivaient en dessous du seuil de pauvreté
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15% de travailleurs pauvres
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un million et demi de travailleurs à temps partiel (à 80 % des travailleuses)
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Un ouvrier sur 10 sans mutuelle
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près de 40 % des actifs en temps partiel disposant de revenus inférieurs au seuil de pauvreté à 60 %.
Par ailleurs, on a pu assister au début de l’année 2009 à une explosion du nombre de dossiers de surendettement.
(source : Observatoire des inégalités)
Et comme la France est bien malade, le gouvernement ment et casse le thermomètre… (voir ici). Il est en effet bien peu pressé de réduire les inégalités, d’autant plus qu’il n’en a plus les moyens, ayant tant dépensé en 2007 (la fourmi se trouva fort dépourvue quand la crise fût venue…), notamment avec…. le bouclier fiscal ! comme le montre cet excellent article de l’Observatoire des Inégalités.
Il est donc assez savoureux de voir le pauvre petit Martin revendiquer un bouclier là où celui qui a servit à protéger les plus riches n’est toujours pas aboli alors qu’il manque tant d’argent pour les plus pauvres…
Et même quelqu’un que l’on ne peut soupçonner d’antipathie idéologique à son égard, comme le président du Secours catholique, a montré son grand scepticisme quant à ce nouveau dispositif, et souscrit à l’argument de l’effet d’aubaine…
Alors, Martin, tu crois toujours en ce que tu dis ? Ou pas… Pauvre, pauvre petit Martin, égaré dans ce monde de brutes… Obligé de mentir, et de trahir… Que fais-tu donc dans ce panier de crabes ? moi qui avait tant d’estime pour toi… avant 2007.
Post-Scriptum : merci à la complicité d’emachedé, administrateur du blog CPolitic, pour la réalisation de l’illustration ci-dessus. En signe d’amitié… by GdeC