Comme le signale encore Julien Gracq, il y a à Nantes une zone « feux de la rampe ». Cette zone s’étend à partir du théâtre Graslin et de cette place vers laquelle convergent les noms prestigieux d’hommes de lettres et de théâtre qui ont tous leur rue ou leur café, Racine, Corneille, Scribe, Crébillon, Corneille, Molière, Marivaux, Voltaire...
La silhouette du théâtre Graslin construit au XVIII° siècle par l’architecte Graslin (pour satisfaire les besoins culturels des riches armateurs ou négriers de l’époque) trône au-dessus de la place et semble imposer à ce rond-point, compliqué pour les voitures, les ombres de la comédie et de la tragédie.
La Flânerie y dépose son barda en haut des marches et une jeunesse oisive continue de regarder le spectacle de la rue, de siffler les petites actrices qui s’enfilent dans les cafés, les restaurants, les escaliers du Passage Pommeraye, la cour ouverte du Cours Cambronne... Le majestueux Cours Cambronne qui prolonge le spectacle et offre en effet son allée sableuse à une autre scène de théâtre spécialement jouée sous les façades de beaux et vastes appartements.
On s’y engage souvent pour rejoindre une autre rue du côté de la Fosse. On entend parfois des notes légères de piano qui filtrent des fenêtres, la voix haut-perchée d’une cantatrice, le rire mutin d’une petite bonne, le miaulement éraillé d’un chat qui se frotte dans les jambes. Et on entrevoit les masques de la Commedia dell’Arte qui passent derrière la vitre. Pantalone grincheux, Arlequin fantasque, Sylvia grâcieuse.
Peut-on pour autant aller jusqu’à espérer entendre la langue de Marivaux dans une cour rabaptisée pour Cambronne ?