Rapport 2009 d'Amnesty International. La situation des droits humains dans le monde

Publié le 30 mai 2009 par Tanjaawi

Le Rapport 2009 d’Amnesty International met l’accent sur le fait qu’une crise des droits humains secoue actuellement le monde. La bombe à retardement sociale, politique et économique sur laquelle nous sommes assis explosera si rien n’est fait pour s’attaquer aux problèmes relatifs aux droits humains.


L’insécurité, l’injustice et l’avilissement sont aujourd’hui le lot de milliards d’êtres humains, et même si de nombreux aspects de cette crise ont pris naissance avant l’actuelle récession économique, il est évident que la situation financière mondiale n’a fait que les aggraver.  
Un nombre croissant de personnes vivent maintenant dans la pauvreté et risquent de plus en plus de voir leurs droits fondamentaux bafoués. En Afrique, la crise alimentaire qui a marqué l’année 2008 a eu des répercussions disproportionnées sur des groupes vulnérables. En Asie, des millions de gens sont venus grossir les rangs de ceux qui vivaient déjà dans le dénuement en raison de la hausse dramatique des prix des denrées alimentaires, des combustibles et d’autres produits de première nécessité.  
Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, la crise financière et la hausse des prix des aliments ont touché les catégories déjà pauvres ou à la limite de la pauvreté, tandis qu’en Europe plusieurs États ont demandé au Fonds monétaire international de les aider à soutenir leurs économies. D’un bout à l’autre de la région, l’écart entre riches et pauvres était énorme.
Il est évident, de plus, que la récession a attisé la répression, des mouvements de protestation contre la pauvreté, les disparités économiques et l’injustice ayant été violemment étouffés.
En 2008, de nombreux gouvernements ont continué à ne pas vouloir entendre les voix des pauvres et de ceux qui vivent en marge de la société.
En Amérique latine et dans les Caraïbes, où plus de 70 millions de personnes ont moins d’un euro par jour pour vivre, la pauvreté, les inégalités et les discriminations ont fait croître le nombre d’autochtones qui se voient refuser leurs droits aux soins, à l’éducation, à une eau salubre et à un logement convenable.  
En refusant de tenir compte des droits humains, les gouvernements ont mis leurs ressortissants en danger.
Au Myanmar, après le passage du cyclone Nargis, le gouvernement a dans un premier temps refusé d’acheminer l’aide internationale destinée aux 2,4 millions de rescapés et a consacré l’essentiel de ses moyens à la promotion d’un simulacre de référendum sur une constitution de pacotille.
Les entreprises et les gouvernements ont continué à s’enrichir financièrement aux dépens des plus marginalisés. Dans le delta du Niger, une vaste région du Nigeria au sous-sol riche en ressources minérales, sur fond de meurtres et d’actes de torture commis par les forces de sécurité en 2008, une contamination étendue de l’environnement liée à l’industrie pétrolière a mis en péril le droit de la population à un niveau de vie suffisant et à la santé.  
En ne mettant pas les droits humains au premier plan, les dirigeants du monde ont omis de se pencher sur un aspect essentiel de la solution qui permettrait d’obtenir une stabilité économique et politique à long terme. Tandis que le G20 revendique le droit de diriger le monde, on peut émettre de sérieux doutes quant à l’engagement de ses membres en faveur des droits humains. Ainsi, d’après les informations parvenues à Amnesty International, des personnes ont été maltraitées et torturées en 2008 dans 15 pays membres du G20.
En Chine, lors des préparatifs des Jeux olympiques et pendant toute la durée des compétitions, la répression s’est durcie dans l'ensemble du pays contre les défenseurs des droits humains, les pratiquants de certaines religions, les minorités ethniques, les avocats et les journalistes. La Chine continue d’être le pays du monde qui procède le plus aux exécutions capitales.
Aux États-Unis, le gouvernement de Barack Obama a bien débuté en entreprenant de faire cesser la torture et les détentions prolongées au secret par la CIA et de fermer le centre de détention de Guantánamo d’ici à janvier 2010. Les États membres de l’Union européenne sont cependant réticents à reconnaître qu’ils ont coopéré avec la CIA dans les « restitutions extraordinaires » de personnes soupçonnées de terrorisme. Des États comme l’Allemagne, le Danemark, l’Espagne, l’Italie et le Royaume-Uni ont fait valoir des « assurances diplomatiques » dénuées de toute garantie pour justifier le transfert de terroristes présumés vers des pays où ils risquaient d’être torturés ou autrement maltraités.
Au Brésil, lors d’opérations policières menées dans des communautés urbaines pauvres, les forces de police ont fait un usage excessif de la force, procédé à des exécutions extrajudiciaires et eu recours à la torture et à d’autres types de violences. L’Afrique du Sud a mis un frein aux pressions exercées sur le Zimbabwe par la communauté internationale pour faire cesser les persécutions politiques. En Arabie saoudite, les opposants politiques sont incarcérés, les droits des travailleurs immigrés et des femmes sont soumis à des restrictions et les tribunaux prononcent fréquemment la peine de mort. Les autorités continuent à autoriser la détention arbitraire et la torture en Russie et, dans le Caucase du Nord, les exécutions extrajudiciaires ainsi que le harcèlement et les agressions de défenseurs des droits humains.  
Au Japon, le nombre des exécutions s’est accru, des détenus ont été soumis à de longues périodes d’isolement et l’accès aux soins médicaux en prison restait insatisfaisant.
Le monde a besoin d’une forme de direction qui fonctionne pour tous ses habitants et pas seulement pour quelques privilégiés, d’une impulsion capable de faire bouger les États et de les faire renoncer à leurs propres intérêts étroits pour s’engager dans une collaboration multilatérale.  
Le monde a besoin d’une nouvelle donne mondiale pour les droits humains
C’est uniquement avec une réponse mondialement coordonnée, fondée sur les droits humains et l’état de droit, que l’on pourra faire face aux conséquences de la crise économique.
Les dirigeants du monde doivent s’investir dans les droits humains avec autant de détermination que dans la croissance économique. Les participants à cette table ronde qui entend diriger le monde ont le devoir de donner l’exemple, en adoptant eux-mêmes un comportement irréprochable. Et il nous incombe à nous, en tant que citoyens, en tant que détenteurs de droits, de faire en sorte que la pression s’exerce sur nos dirigeants politiques.  
En lançant sa campagne Exigeons la dignité, Amnesty International espère s’attaquer à la pire des crises qu’a connue le monde dans le domaine des droits humains. Nous allons œuvrer ensemble pour lutter contre les atteintes aux droits humains qui participent à l’extension et à l’aggravation de la pauvreté, afin de donner à ceux qui sont pris dans l’étau de la misère les moyens de changer eux-mêmes leur vie.

Amnesty