Donner au joueur l’impression d’être impliqué dans une véritable enquête a été l’élément moteur d’In Memoriam. Pour générer ce sentiment d'immersion dans l'histoire, le pari était d'étendre le terrain de jeu à Internet. Il fallait que les éléments de la fiction parviennent à s’immiscer dans la vie quotidienne du joueur et, qu’inversement le joueur découvre sur le net des informations et des indices qui paraissent véridiques. En laissant le joueur surfer librement sur le web, nous prenions le risque qu'il découvre des informations contradictoires. Pour limiter ce risque, il fallait absolument que les lieux dans lesquels se situe
l’action, les langues secrètes utilisées par le Phoenix pour crypter
certains messages, les personnages et les évènements auxquels il fait référence, soient
non seulement crédibles, mais parfaitement conformes à la réalité
historique. Cela a nécessité un travail de documentation et de
vérification très important et, pendant les tournages, cela nous a
obligé à filmer sur les lieux réels de l'intrigue ce qui nous a réservé quelques surprises.
Prague, épisode 1. Janvier 2002.
Après avoir
retrouvé la maison dans laquelle avait vécu Tycho Brahé, célèbre
astronome du XVI ème siècle, nous devons tourner une scène où Jack, le
héros, retrouve en pleine nuit des symboles magiques dessinés par le
Phoenix. Or, même si cette maison n’est pas très connue, elle apparaît
parfois dans certains sites qui évoquent le personnage. Aucune possibilité
de tricher. Le problème c’est que cette maison se situe à quelques
encablures du château qui abrite la Présidence de la République. C’est
donc, vous l’imaginez, un endroit assez surveillé. Comme nous devons
taguer un mur avec du faux sang, le tournage prend vite une allure de joyeuse performance.
Toute l’équipe se rend sur les lieux aux alentours de minuit. Alors qu’ils ne
tournent pas cette nuit là, les acteurs (Olivier Chenevat et Caroline Charléty) nous accompagnent par solidarité (et
aussi par curiosité).
Pendant qu'ils font le guet, je me mets au travail, sortant peinture et pinceau, pas mécontent au passage
d’avoir suivi des études d’arts plastiques. Une fois le "tag" réalisé, on s’empresse de
tourner les prises car la neige qui tombe commence à faire baver les
symboles. Avant de partir, nous tentons d'effacer les symboles afin de laisser l'endroit aussi propre que nous l'avons trouvé. Impossible, la peinture est déjà imprégnée sur le mur. Tant pis, nous quittons les lieux, persuadés que notre tag ne résistera pas plus d'une semaine.
Prague, épisode 2. Novembre 2003
De nombreux mois plus tard, Thomas Becart, journaliste à Télérama, se rend à Prague sur les traces du Phoenix. Il photographie la rue et le mur sur lequel on devine (oh surprise !) les symboles, qui, finalement, ont résisté au temps.
Il publie son reportage sur le site de Telerama. (Dommage, il n'est plus en ligne).
Prague, épisode 3. Juillet 2004.
L'année suivante, une partie de l'équipe retourne sur place, cette fois en été, pour tourner certaines scènes de
la Treizième victime. Les traces y sont toujours, un peu
effacées quand même. Alex Varga pose devant l'objectif.
Je demande à Philippe Boucher (caméraman, monteur, preneur de son, éclairagiste, assistant de production et occasionnellement accessoiriste !) quelle est la marque de la peinture utilisée... Le CSA, hélas, ne m'a pas autorisé à la divulguer sur ce blog, en pleine campagne électorale...
Prague, épisode 4. 2004-2007, les joueurs en pélerinage.
Depuis la sortie du jeu, je reçois régulièrement des photos du tag prises par des joueurs qui, à l'occasion d'un séjour à Prague, se rendent en pélerinage sur les lieux.
J'en ai encore reçu une il y a quelques temps qui m'a donné envie d'écrire ce billet.
Si
jamais vous allez à Prague à votre tour, n’hésitez pas à me demander l’adresse
(c’est l’une des énigmes du jeu alors je ne vais pas la donner
publiquement !). Le quartier est l’un des plus bucoliques de la ville.
Mais surtout n’y allez pas la nuit, la fantôme du Phoenix rôde !