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Il faut dire que ce premier emploi à la Lainière de Roubaix me laissait perplexe sur mon avenir professionnel.......
Après ce très bel échec de "mon premier emploi", et toujours grâce aux relations de mes parents, on me proposait un poste de secrétaire dans une importante compagnie d'assurances. Je remplaçais en fait une personne qui partait en retraite.
Je venais d'être engagée comme secrétaire du chef de service qui gérait les portefeuilles des agents généraux et courtiers, impressionnant lorsqu'on démarre dans la vie active !!!
J'étais assez à l'aise dans ce nouveau job, bien que débutante et timide.
De plus mes parents venaient de céder le bistrot et emménageaient à Roubaix, non loin de mon nouvel emploi, ce qui m'arrangeait assez bien, parce que j'avais pris l'habitude d'arriver, une fois le portail d'entrée fermé.
La ponctualité n'était pas ma qualité première !!!
Je m'entendais parfaitement avec mon nouveau chef de service, nous partagions le même bureau, et habitions le même quartier.
Il aimait plaisanter, et m'amusait beaucoup lorsqu'il appelait un des employés situé dans le grand bureau à côté du nôtre en criant son nom assez fort :
"CARETTE", pour ajouter un peu plus bas "A QUIENS".
Qui n'est pas d'origine du Nord de la France ne peut comprendre le Chti, néanmoins je ne le parlait pas, mais je comprenais que cela signifiait "charette à chiens".
Pourquoi à chiens, cela je ne le saisissait pas, et j'étais trop timide et peur de paraître stupide, pour en demander la signification.
J'ai finalement compris un jour l'origine de cette expression :
Au début du XXème siècle ROUBAIX devant faire face à l'industrie florissante, et le nombre croissant d'arrivants et d'habitants, le pain des boulangeries coopératives arrivait à bras d'homme pour les plus modestes, les porteurs de lait ( et les vendeurs de lait battu ( c'est le lait fermenté que l'on trouve actuellement au rayon frais des supermarchés) apportaient leur précieux liquide jusqu'au portes des courées, alors que les carettes à quiens servaient aux petits transports de café, de journaux ..............
ci-dessus les livreurs de pain, et les chiens sous la charette
ci-dessus, à gauche livreurs de lait et lait battu
à droite la "carette à quiens" qui servait au transport du café, journaux etc .....
Ce réel premier job, je le supportais 3 années.
Je me disais que cela me permettrait au moins de connaître les départements français sur le bout des doigts, et mes envies d'évasion me démangeaient le fait d'imaginer les différentes régions...............
Comme c'était la période des Hippies, les déplacements en auto-stop étaient très en vogue à cette époque.
Il n'était d'ailleurs pas rare que je me rende en Belgique ou Hollande, en auto-stop, à l'insue de mes parents, uniquement pour l'achat d'une paire de chaussures !! Ou encore pour aller visiter la maison de Rubens !!!
Evidemment, cela faisait un peu loin, mais le goût de l'aventure et d'évasion était prioritaire sur le choix de mes achats.
C'était une époque, où l'auto-stop faisait partie des moeurs de la nouvelle génération, donc indispensable, et je m'arrangeais toujours pour être accompagnée de ma soeur, ou d'une connaissance de quartier.
Ces envies d'évasion, et le déclin du textile, me détachait totalement de ma ville natale où nous étions revenus vivre.
Autant j'avais apprécié Wattrelos, autant je me désintéressais de Roubaix.
Lorsque survint le décès de ma grand-mère maternelle, nous avions un oncle que je ne connaissais pas, qui s'installa chez nous, pendant la période des obsèques.
Il avait fait carrière dans la marine et habitait Toulon. J'avais souvent entendu parler Maman de ses vacances de jeunesse chez son frère à Toulon, avant ma naissance.
Il proposa à mon frère et moi d'y passer les vacances d'été, et bien évidemment, ravis, nous avions immédiatement accepté.
J'allais enfin connaître la Méditerranée et j'avais vingt ans........
Ce fut tellement merveilleux et totalement différent de la grisaille du Nord, que je décidai d'y retourner pour m'y installer définitivement avec l'aide de mon oncle.
J'adorais la cuisine, le climat et les paysages tellement différents de ma région natale, mais impossible de me trouver un emploi intéressant.
Découragée et impatiente, je finis par renoncer et retourner découragée, à contre-coeur dans la grisaille du Nord. Le goût de l'aventure me fit traverser la France entière, seule, en auto-stop bien évidemment, pendant que je tricotais dans la voiture de mes différents chauffeurs, tout en admirant les différents paysages.
Je sais impensable à l'heure actuelle, mais je l'ai fait et sans aucun problème .................
Quelque temps plus tard, je récidivais, suivant de peu des amis qui souhaitaient quitter Roubaix, pour s'installer à Cannes.
Je traversais à nouveau mais en sens inverse, la France en auto-stop, et accompagnée de ma petite soeur âgée alors de 15 ans.
Inutile de vous dire l'angoisse de mes parents qui m'ordonnèrent de renvoyer ma petite soeur illico-presto à Roubaix (sous-peine de détournement de mineur) après un mois de vacances passées à Cannes............
Moi j'y restais et j'eus la chance de trouver un logement situé dans la rue d'Antibes, à côté d'un grand hôtel.
Toutes mes économies y passèrent, mais heureuse, j'avais un balcon qui donnait sur la rue d'Antibes et une sublime salle de bain en marbre rose, j'habitais juste derrière la Croisette, et à 100 mètres d'un nouveau job qui m'attendait.........
Que pouvait-on espérer de mieux pour démarrer dans la vie !!!!!