Pakistan, somalie, yémen : offensive islamiste tous azimuts

Publié le 29 mai 2009 par Anomalie



PAKISTAN : MENACE D’ÉCLATEMENT (Source : Le Figaro)
Jamais le message des talibans pakistanais n'avait été aussi violent. Revendiquant l'attentat de la veille à Lahore, qui a fait 24 morts et plus de 300 blessés, un militant islamiste a déclaré jeudi : « Nous avons atteint notre objectif. Nous attendions cela depuis longtemps ; nous avons agi en réaction contre l'opération de Swat ». L'homme, qui s'est présenté sous le nom de Hakimullah Mehsud, est un fidèle lieutenant de Baitullah Mehsud, le chef du
Tehreek-e-Taliban-Punjab (TTP), basé dans la zone tribale du Sud-Waziristan.



« Nous demandons aux habitants de Lahore, Rawalpindi, Islamabad et Multan de quitter ces villes car nous projetons de très importantes attaques contre les bâtiments du gouvernement dans les jours et les semaines qui viennent », a-t-il poursuivi. En clair, ce sont les quatre grandes métropoles du Pendjab qui sont visées. Ce n'est pas un hasard. La province, qui fournit les plus gros contingents à l'armée pakistanaise, est dans la ligne de mire des talibans. Muslim Khan, le porte-parole des talibans de Swat, très proches du TTP, a lui aussi appelé à la « revanche ». « Il faut attaquer les soldats au Pendjab, afin qu'ils comprennent et souffrent eux aussi. Les attaques devraient frapper leurs maisons, de manière que leurs enfants soient tués ; comme ça, ils réaliseront ce que c'est », aurait déclaré Khan, lors d'une conversation téléphonique interceptée par les militaires. Depuis le début des offensives de l'armée dans la région de Malakand, d'abord à Lower Dir, puis à Buner, et enfin dans la vallée de Swat, début mai, la ligne de fracture entre le Pendjab, qui est aussi la province la plus riche du pays, et les terres pachtounes du nord-ouest du pays, où se livrent les combats, ne cesse de se creuser. Un conflit socio-culturel, qui couvait déjà, bien avant les talibans, mais dont ils ne manqueront pas de s'emparer s'ils le peuvent. Le terreau est fertile. « Tous les Pachtouns ne sont pas des talibans. Le problème, c'est que le gouvernement d'Islamabad n'a jamais rien fait pour nous », nous déclarait récemment à Peshawar Aftab Alam, le président de l'Association des avocats de Swat. Il venait juste de fuir Mingora, la capitale de la vallée de Swat. Bien sûr, il veut que l'armée en finisse avec les islamistes, mais pourquoi les responsables d'Islamabad n'ont-ils pas préparé des camps dignes de ce nom pour les réfugiés ? Que se passera-t-il lorsque les gens qui voudront rentrer chez eux ne trouveront que ruines, un bétail décimé, des récoltes perdues pour plusieurs années ? « Nous sommes pris entre les talibans et les États-Unis qui dictent leurs volontés à notre gouvernement », affirmait, amer, Aftab Alam. Peu ou prou, il exprimait ce que ressentent les quelque 2,4 millions de déplacés qui ont dû quitter leurs maisons, leurs emplois. Cet exode - le plus important en Asie du Sud depuis la Partition, en 1947 - est celui de tous les dangers pour le Pakistan, en ce qu’il crée des déséquilibres entre le pays pachtoun et la riche province du Pendjab. À la tragédie humaine s'ajoute donc la menace de voir le pays éclater, des provinces telles que le Sind (capitale Karachi) essayant de se « protéger contre une invasion pachtoune », porteuse, selon certains, d'une « contamination terroriste ».



« Il faut faire attention à ne pas faire des Pachtouns des martyrs », reconnaît, à Islamabad, le général à la retraite Talat Masood. Difficile, quand on écoute certains réfugiés. Nombre d'entre eux affirment que les bombardements de l'armée ont tué plus de civils que d'insurgés dans la vallée de Swat. « Un Pachtoun n'oublie jamais. Des civils ont été tués, il y aura donc de la violence, même si l'armée l'emporte. Les Pachtouns sont connus pour leur sens de la revanche », affirme Khalid Rahman, directeur de l'Institute of Policy Studies à Islamabad.

YEMEN : LES JUIFS JOUENT LEUR SURVIE (Source : Le Figaro)

Un keffieh beige sur la tête pour masquer la kippa, Yéhia Moussa arrive en famille au rendez-vous fixé dans le parc Asser, qui surplombe Sanaa. Il est le rabbin de la minuscule communauté juive de la capitale yéménite : douze familles obligées de vivre recluses dans un « complexe touristique » gardé par la sécurité publique, depuis qu'elles ont été attaquées dans leur village d'al-Salem, au nord du Yémen. C'était en décembre 2004. « On ne voulait plus de nous là-bas », se souvient, amer, Yéhia, 30 ans, père de quatre enfants. Les rebelles de la minorité zaïdite (chiite) leur reprochaient d'être soutenus par l'armée du président, Ali Abdallah Saleh, qu'ils affrontaient alors.
Après des décennies de coexistence relativement harmonieuse avec leurs voisins musulmans, tout a basculé lorsque des hommes masqués adressèrent une lettre de menace au rabbin : « Après surveillance précise des Juifs d'al- Salem, il est clair qu'ils agissent pour servir le sionisme mondial ». Et d'assortir l'avertissement d'un ultimatum de dix jours pour plier bagages. Finalement, les Juifs d'al-Salem furent d'abord évacués vers la ville voisine de Saada et, un mois plus tard, en hélicoptères militaires jusqu'à leur minighetto de Sanaa, face à l'ambassade américaine.

« Ici, au moins, on se sent en sécurité », se félicite Souleiman, le vieux père de Yéhia. Mais depuis, la plupart ont perdu leur travail. Et cinq ans après, leurs biens n'ont toujours pas été restitués. Les 57 Juifs de Sanaa, religieux en majorité, vivent littéralement sous perfusion : tous les mois, la présidence de la République verse l'équivalent de 18 euros à chacun d'eux, et offre un peu de nourriture aux familles.
Yéhia, Souleiman et les autres sont pourtant les descendants de l'une des plus vieilles communautés juives au monde. Dans le sillage des caravanes du roi Salomon, les premiers Juifs s'installèrent au Yémen neuf siècles avant Jésus-Christ, bien avant la présence musulmane. Mais la communauté lutte désormais pour sa survie. Ils ne sont plus que 350, répartis entre Sanaa, Kharef et Raïda. Ils étaient plus de 60 000 au début du siècle dernier. La plupart ont émigré après la création d'Israël en 1948, lorsque l'opération « Magic Carpet » vida le vieux quartier juif de Sanaa de ses habitants. En restera-t-il encore dans cinq ans ? Le harcèlement, les pressions et parfois les attaques se multiplient dans un pays où l'islam radical a le vent en poupe. En décembre, le rabbin Moshe Nahari, 38 ans, père de neuf enfants, a été tué près de chez lui à Raïda. L'assassin, un ancien pilote de l'armée de l'air, fut déclaré mentalement instable… Quelques semaines plus tard, l'offensive israélienne à Gaza aggrava encore les tensions entre Juifs et musulmans. « Regardez cette revue, lance Yéhia, en tendant Yemen Online, elle écrit qu'on reçoit de l'argent de l'étranger, mais c'est faux ! », s'insurge le rabbin. Officiellement, le pouvoir les protège. Mais en fait, l'attitude des autorités est ambiguë. « Les promesses du gouvernement en matière d'indemnisation ou d'octroi de terrain aux Juifs n'ont pas été tenues », déplore l'intellectuel musulman, Mahmoud Taha, qui joue les médiateurs entre la communauté et le régime.



Sheikh Abdul Majid Al-Zandani

Devant le journaliste, Yéhia et les siens louent « Allah et le président Saleh ». Mais loin des micros, les langues se délient. « Un jeune de Raïda qui voulait venir célébrer le shabbat à Sanaa la semaine dernière n'a pas pu entrer dans notre quartier, car les gardes du ministère de l'Intérieur lui ont réclamé une autorisation officielle » , se plaint un de ses amis. Ces derniers mois, une vingtaine ont émigré en Israël, à la faveur d'opérations spéciales de l'Agence juive. « C'est leur choix », répond laconiquement Yéhia. Le pouvoir ne les freine pas. Mais les Juifs du Yémen ne discutent pas publiquement de leurs velléités de partir.
« On vit ici, on mourra ici », jure Naami, la mère de Yéhia, recouverte des pieds à la tête d'une longue tunique noire, comme les autres femmes yéménites. « Nos racines, nos traditions sont ici, poursuit Yéhia. D'accord Israël est le pays des Juifs, j'ai des oncles là-bas, mais nous désapprouvons leur politique vis-à-vis des Palestiniens ». Comme les Irakiens sous Saddam Hussein, les Juifs yéménites ont appris l'art de la dissimulation, pour ne pas s'attirer d'ennuis. Pourtant, les plus jeunes pressent leurs parents de les laisser partir. Les filles (70% des adolescents) ne trouvent plus de maris, sauf à faire venir des Juifs de la diaspora… qui repartiront ensuite avec leurs épouses.


SOMALIE : LES CHEBAAB LANCENT LE DJIHAD

Comme nous l’avions prévu à de nombreuses reprises, depuis trois semaines, de violents combats qui ont fait plus de 200 morts et 45000 déplacés opposent les « islamistes modérés » au pouvoir à leurs anciennes métastases radicales, les Chabaab-el-Mudjahiddin et leurs alliés du Hizbul-Islam. 
Après avoir pris Johwar, la ville du président Sheikh Charif Ahmed, à 90 kilomètres de Mogadiscio, les insurgés islamistes concentrent leurs attaques sur la capitale, et font vaciller le nouveau gouvernement de coalition.