J'apprends à l'instant que Jean CHOUQUET vient de casser sa pipe, dans sa 83ème année. Cela me touche beaucoup parce que ce grand homme de radio et de télé m'a appris beaucoup de ce que je sais de ce métier. CHOUQUET a transmis son amour de la radio a des centaines de gamins prompts à bouffer le micro sans réfléchir, alors qu'il formait les animateurs des locales de Radio France (entre 1985 et 1997), et les a corrigés comme ils le méritaient.
Une figure, perdant les cendres de son éternelle clope au bec sur son polo, errant avec les jeunes recrues dans les bistrots de Melun ou de Fontainebleau jusqu'à pas d'heure, vous traitant plus souvent de connard que de génie, mais avec généralement un rien d'affection goguenarde.Un genre d'Orson Welles parigot, vous expliquant nuitamment le monde par Audiard, Pythagore, André Frédérique, Queneau et Jack Daniels, apprenant la voix et le souffle aux jeunes animatrices, assis en tailleur ou allongé sur la moquette d'un studio. Sacré bonhomme! Et grand comediante!
Pour mémoire, Jean CHOUQUET fut membre du Club d'Essai dirigé par Jean Tardieu en 1947. Producteur, auteur et réalisateur de dramatiques, documentaires, fictions, émissions d'humour, de poésie ou de chanson, pour l'ORTF, il crée dans les années 50/60 un style de radio assez décoiffant pour l'époque. Conseiller pour les programmes puis grand dirlo de FRANCE INTER dans les années 70/80, Jean a fait démarrer des tas de producteurs et d'animateurs (des bonnes et des bons, il avait le nez!), et fait bosser des pléiades de comédiennes et de comédiens du théâtre ou du cabaret. Je me souviendrai longtemps de la fête de son jubilé, en février 92, à Radio France, en compagnie de Claude Villers, José Artur...et un Philippe Noiret admiratif et reconnaissant.
A ma pomme, le petit Fournelo, CHOUQUET disait "Toi, t'es pas un comique, t'es un baroque!"...ou "Tu chantes tout le temps dans le micro, Fournel, t'as qu'à faire chanteur!". Je n'ai pas suivi ce dernier conseil, j'ai continué à être baroque, et j'ai bien ri....et j'ai adoré le faire à plusieurs, en grimpant un jour, à mon tour sur Inter.
Vous, monsieur Jean, vous êtes resté cette slihouette Hitchcockienne que je croise parfois, même quand ce n'est pas vous, du côté du café "Les Ondes". ou sur les quais de Seine. Bonjour à Queneau, bonjour à Sire, bonjour à Noiret, humblement, de la part d'un de vos p'tits connards!
Bien à vous, Jean!
Serge Fournel