Le monde se divise en deux, c’est certain

Publié le 29 mai 2009 par Innommables

As-tu remarqué?

Le monde se divise en deux.

Pas en trois, ni en quatre, ni (à Dieu ne plaise) en d’innombrables portions regroupant des individus que rapprocheraient quelques convictions politiques communes, l’amour du cinéma turc des années 50 ou l’aquariophilie d’eau douce.

Non.

Le monde se divise en deux.

Et même si Michel Quint, plus connu pour son roman Effroyables jardins que pour sa fonction de prof de lettres, se tue à te répéter que "le manichéisme en histoire est une sottise", tu conviendras comme moi qu’en histoire comme ailleurs, le manichéisme est l’équivalent doctrinal du bon gros fauteuil en cuir stratégiquement placé devant la cheminée où pétillent deux grosses bûches par une glaciale soirée d’hiver: le (ré) confort absolu à moindres frais.

Ne me regarde pas comme ça, je suis la première à reconnaître le simplisme de mes prises de position, j’ai honte (ça ne se voit pas? je vais faire un effort).

Qu’est-ce qui me prend de verser soudain dans la métaphysique de comptoir, me demanderas-tu ?
Je ne sais.

Soit je file un mauvais coton.

Soit la victoire espagnole en Ligue des Champions, dont je me contrefous personnellement comme de ma dernière chaussette, a durablement perturbé mon légendaire sens de la gaudriole et de l’humour gras.

Peut-être (je dis bien peut-être) ai-je relativement mal digéré la bagarre générale qui a éclaté au foyer d’hébergement mercredi soir après la défaite de Manchester, bagarre amicale et sportive bien entendu, au cours de laquelle les génitrices des supporters avinés ont été copieusement insultées, le Prophète de l’Islam traîné dans la boue (quel rapport? Ne me le demande pas, je ne pourrais pas te répondre), les spectateurs à fort taux de mélanine abreuvés de cris de singes et l’un de mes patients légèrement blessé par la rencontre (accidentelle, évidemment) d’une bouteille de whisky avec sa boîte crânienne.

Et encore.

Nous avions la chance de nous trouver quelque part en banlieue parisienne, et non pas au Nigeria, où la victoire de Barcelone a donné envie à un chauffeur de bus d’écraser quatre piétons.
Représailles bien légitimes, me diras-tu, et je ne pourrai qu’opiner du chef.

Et si la planète n’était après tout qu’un gigantesque ballon de football que se disputent six milliards de connards persuadés d’être dans le bon camp?