« Retraite dorée, langue de bois, contradictions et autres mensonges ! » [FIN]

Publié le 28 mai 2009 par Raoul Sabas

Le 28 mai 2009


Objet :

« Retraite dorée, langue de bois, contradictions et autres mensonges ! » [FIN]

 
Monsieur Jean-François Kahn

Marianne

32, rue René Boulanger

75010 PARIS

Fax : 01 53 72 29 72

Courriel :

s.marty@journal-marianne.com

Monsieur,


Vous n'y échappez pas personnellement, puisque vos réponses esquivent toujours le débat sur le fond, et que les contradictions tirées de votre courrier antérieur ou de vos propos publics l'attestent. Or, comme déjà dit, toute présumée vérité, qui comporte des contradictions, ne saurait être LA Vérité absolue - sauf à vous-même ou à quiconque, évidemment, de démontrer le contraire !
 

La constance de votre contradiction fondamentale est manifeste, puisque, tout en condamnant sans appel la « certitude » avérée des grands diseurs universels de LA Vérité éternelle absolue, vous demandez en même temps aux électeurs potentiels de croire sur parole en votre « certitude » de pouvoir changer le monde, donc de transposer l'Idéal dans le quotidien - sauf à le laisser perdurer dans l'état actuel avec ses inégalités permanentes, ses conflits perpétuels et autres maux sempiternels de l'humanité, dont la liste est longue ! Pour établir la contradiction dénoncée, je me fonde sur votre courrier et vos propos publics rappelés ci-après, entre juin 2002 et octobre 2006.


Au vu des preuves apportées, vous aurez beaucoup de mal à nier vos « croyances au miracle », qui font de vous un politicien arriviste, et non un homme politique responsable, dont on peut légitimement se demander s'il en existe réellement un seul, qui ne « vend pas de la poudre pour les yeux ». Pour être tout à fait honnête, intellectuellement parlant, je viens de le trouver, mais ce n'est pas François Bayrou - celui-là, c'est un vrai socialiste, et il partage pourtant mon opinion dénonçant les dogmes, les mensonges et la « croyance au miracle » du Parti socialiste !


Quant à vous, malgré maintes mises en garde intellectuellement et philosophiquement argumentées contre les mensonges et les « croyances au miracle » du monde, vous écriviez encore dans votre lettre du 10 octobre 2006 :


« Si vous estimez qu'on ne peut ni changer le monde ni rendre la société plus juste, Marianne n'est pas fait pour vous. » [SIC !]


Ce propos n'était toutefois qu'une resucée de votre déclaration de juin 2002 sur le plateau de Ripostes, en réponse aux propos de Philippe Manière, journaliste à BFM, qui avait déclaré à l'adresse des idéologues d'extrême gauche participant à l'émission :


« Il faut arrêter de dire qu'on va changer le monde, non pas qu'on ne puisse pas le changer à terme, vous allez le faire, sûrement, dans mille ans, dans deux mille ans. Il vaut mieux dire aux gens, qu'il faut qu'ils prennent leur destin en main. Je pense que vous enfermez les gens dans la désespérance, en les faisant rêver à des lendemains qui chantent. »


Outre que je ne partage absolument pas cet avis sur l'arrivée considérée comme certaine de ce monde idéal, fut-ce dans mille ou deux mille ans, voire dans dix mille, autrement dit jamais, vous aviez néanmoins répondu sur un ton non moins assuré :


« Si on dit qu'il faut cesser d'essayer de changer le monde et la société, alors, moi, je vais vous dire que vous ouvrez un boulevard formidable à ceux qui, eux, vont le dire pour le pire, qui sont les intégristes religieux, et qui le disent, les fascistes, et qui le disent, les nationalistes, et qui le disent ; si les démocrates sont les seuls aujourd'hui, s'ils disent qu'ils ne sont pas capables de transformer une société injuste, c'est épouvantable. » [Fin de citation]


Pour commenter brièvement votre propos, je vous dirai simplement d'oublier les religions, fidèles intégristes ou non, car, contrairement aux idéologies, aucune d'entre elles n'envisage l'avènement de ce monde idéal, le paradis, sur la Terre, mais dans un ailleurs tout aussi imaginaire, auquel je ne refuse à personne le droit de croire, dès lors que cette croyance suffit à enjoliver sa vie.


Et si dans votre lettre du 18 février 2004, vous écriviez : « Je vous joins ce petit livre. Mais, j'ai aussi maintes fois stigmatisé l'idée même d'un monde parfait et montré que la dynamique est plus importante que la finalité, le « vers » que le « où », ma réponse du 29 février faisait ressortir la contradiction entre ces propos et ceux tenus antérieurement sur le plateau de Ripostes, où vous exprimiez « votre certitude » de pouvoir changer le monde.


« Ça » fait beaucoup de contradictions, et donc votre « certitude » demeure toujours une ambiguïté pour ceux qui « croient au miracle » d'un monde parfait avec des humains imparfaits. Ainsi vous les guidez, en les faisant tourner indéfiniment en rond « vers » quelque chose, dont vous n'auriez pas la moindre idée : hormis le monde idéal que vous récusez, tout en le défendant par ailleurs - vous avez dit « contradiction » ? !


Toutefois, je n'entends pas reprendre ici l'intégralité de l'argumentation déjà avancée dans des dizaines de pages pour dénoncer la superstition idéologique et moraliste, mais établir vos contradictions de candidat du MoDem faisant rêver d'une Europe idéale, telle que récemment défendue par François Bayrou sur France Culture, car je ne pense pas qu'il y ait de faille entre sa pensée politique, voire idéologique, et la vôtre ; c'est pourquoi mes critiques peuvent s'entremêler par la suite.


Auparavant, j'entends d'abord critiquer François Bayrou, dont j'attends toujours un début de réponse aux multiples lettres dénonçant sans ambiguïté ses mensonges, dont le moindre n'est pas de faire croire qu'il n'a jamais été de droite, ou qu'il n'est pas un humain égoïste ordinaire dans ses rapports à l'argent, avec ses chevaux de course, et à la gloire, avec son ego démesuré de devenir « président des Français », ainsi qu'un récent lapsus public révélateur a témoigné de son obsession.


Quant à ce qu'il fera durant un éventuel mandat présidentiel, si son action doit se fonder sur son illusoire « libre arbitre », auquel vous croyez toutefois, c'est un mensonge public supplémentaire. Comme je m'en suis amplement expliqué par ailleurs, le devenir du monde ne dépend nullement de la soi-disant libre volonté d'un individu, fut-il chef d'Etat, mais de ce que Spinoza appelle la « nécessité », et en vertu de laquelle TOUT ce qui se produit dans notre monde (phénomènes naturels, évènements historiques, actions collectives et actes individuels) relève de l'enchaînement infini de l'infinité des causes et des effets résultant du mouvement universel perpétuel des choses de notre monde - sauf à François Bayrou, à vous-même ou à quiconque, évidemment, de démontrer le contraire !


Faute de jamais y parvenir, vous les personnages publics, les soi-disant « élites » médiatisées faiseuses d'opinion aujourd'hui, vous n'en laissez pas moins vos contemporains « croire au miracle », comme il en va notamment en matière de scientisme. Là, vous avez même réussi à faire croire aux humains d'aujourd'hui qu'ils auraient le pouvoir, tous ensemble et de manière unanime évidemment, d'établir sur la planète un « climat sur mesure » pour l'éternité. « Yes, we can » : nous pouvons, parce que nous le voulons, dixit la « méthode Coué ». 
Quand on en est à un tel stade de « croyance au miracle », l'époque témoigne que sa « débilité intellectuelle » est décidément sans limite ! Alors, imaginez si la construction de l'Europe idéale est susceptible de faire peur à tous ces « croyants au miracle »  - mais DEMAIN, certes, toujours DEMAIN, et seulement DEMAIN, hélas, à la saint Glinglin ! ! !


Et forcément pour tous ces « vertueux » égoïstes marchands de rêve et autres vendeurs d'illusion, la fin justifie toujours les moyens, notamment celui consistant à reprocher aux Autres ce qu'eux-mêmes ont fait hier, et referont demain à la première occasion où leurs intérêts de toutes sortes l'exigeront, comme il en va assurément pour tout un chacun dans sa vie personnelle.

Toutefois, je m'en suis suffisamment expliqué par ailleurs dans mon courrier à votre intention et à l'adresse de François Bayrou pour ne pas y revenir ici en détail ; et ce d'autant moins que je joins à ce courrier ma lettre du 18 septembre dernier à Nicolas Sarkozy, ayant pour objet « Philosophie, euthanasie et "débilité intellectuelle" », ainsi que celle du 13 courant adressée à France Culture sous l'intitulé « J'ACCUSE [BIS] : Assez de mensonges, de manipulation, de lâcheté et de "débilité intellectuelle" ! »


Si pour les censeurs la fin justifie les moyens, elle signifie en même temps manquer à l'honnêteté intellectuelle la plus élémentaire. Celle-ci ne consiste pas à faire peser sur autrui, voire sur un seul homme transformé en bouc-émissaire, tous les péchés de la Terre, fut-ce un amour démesuré de l'argent, car on a nettement moins entendu François Bayrou dénoncer les « années fric » de l'ère Tapie sous la présidence de François Mitterrand, dont il était précisément ministre, alors qu'il aurait pu s'en tenir à un rôle d'opposant - et pourquoi ne pas dénoncer aussi les turpitudes en matière d'argent de Julien Dray et des associations moralisatrices donneuses de leçons aux Autres, voire d'autres élus socialistes - mais pas seulement !


Par ailleurs, l'appétence forcenée, voire obsessionnelle, pour les ors et les palais de la République n'est rien d'autre que l'attrait du « bling-bling » - sinon, on peut toujours s'en tenir à un modeste rôle de député de base ! C'est pourquoi votre « croisade » commune contre l'argent roi, manifestation d'anti-sarkozysme primaire, ne peut être que suspecte - sauf à ignorer que le rêve du plus pauvre est de devenir immensément riche, sauf rares exceptions ! Sinon, pourquoi le succès de tous les jeux d'argent, partout et encore aujourd'hui ? !


En la matière, je constate que vous ne semblez guère être dérangé dans vos principes « moraux », voire moralisateurs, par l'encaissement d'un revenu mensuel supplémentaire de 7.600 euros, je dis bien sept mille six cents, pour quelques jours de présence par mois à l'assemblée parlementaire européenne - de l'argent de poche, en somme, pour quelqu'un qui dénonce la course à l'argent, alors que la possession des biens les plus divers, voire de personnes, est une des manifestations indéniables de notre égoïsme inné, auquel personne n'échappe - et elle réclame précisément de disposer de toujours plus d'argent !


Certes, vous pouvez toujours me dire que votre but est noble et que vous visez seulement l'avènement d'une Europe idéale, mais on en revient toujours à la « croyance au miracle » de pouvoir transposer l'Idéal dans le quotidien, la théorie dans la pratique. Il suffit d'ailleurs de vous regarder débattre pour constater que vous, les candidats des différentes formations, n'êtes pas d'accord sur grand chose, pour ne pas dire sur rien, comme il en va à propos de l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne, d'immigration et d'Europe sociale, notamment - et de ce désaccord généralisé devait surgir une entité idéale réunissant des points de vue diamétralement opposés !


Assurément, vous « croyez au miracle » - ou du moins, tentez-vous d'y « faire croire » ! ! ! Vous auriez bien tort de vous gêner, puisque l'être humain est davantage porté par nature à « croire », à répéter et à imiter, qu'à penser « vraiment » ; mais ce n'est pas là un signe manifeste d' « honnêteté intellectuelle » aussi longtemps que l'on refuse d'en débattre...


Cette Europe, en effet, que d'aucuns viennent nous vendre tous les cinq ans n'a toujours ni Traité commun sur lequel fonctionner, ni monnaie unique, ce qui devrait être la moindre des choses dans une Union se voulant économique au départ, et pas davantage de mesures sociétales fondées sur des valeurs identiques à en juger en matière d'euthanasie et d'interruption volontaire de grossesse, par exemple, puisqu'on interdit ici ce qui est autorisé ailleurs - vous avez dit « Union » ? !


En conclusion, nous reparlerons également des soi-disant valeurs que vous mettez en avant contre l‘argent, quand vous le souhaiterez, puisque vous disposez d'ici-là de mon argumentation antérieure condamnant sans appel le Bien et le Mal prétendument absolus sur lesquels elles se fondent.


Jusque-là, dans l'attente de vos éventuelles objections intellectuellement et philosophiquement étayées sur ce courrier, mais aussi sur celui figurant en annexe, à défaut de quoi vous manifesteriez votre intention délibérée de continuer à colporter les mensonges et les « croyances au miracle » du monde, je vous remercie de votre attention et vous prie d'agréer, Monsieur, mes salutations distinguées.

Annexe : I - Lettre du 18 septembre 2008 à Nicolas Sarkozy
   II - Lettre du 13 mai 2009 à France Culture


[Les éventuels défauts de présentation sont indépendants de ma volonté]