Laisser sa femme évoluer sur le devant de la scène, pourquoi pas. Après tout, c’est une artiste, cela fait partie du mode d’emploi. Et puis, peut-être aussi y’a-t-il l’amour, qui, s’il peut donner des ailes, doit bien pouvoir être capable de faire en sorte qu’elles se replient bien humblement…
Mais laisser les médias faire en sorte que les projecteurs soient braqués sur Carla Bruni-Sarkozy et non sur son hyperprésident de mari, ça on ne peut
pas soupçonner que cet habile communicant agisse de la sorte.
C’est donc qu’il y a autre chose, mais quoi ?
Il est évident et cela n’a pas échappé à grand monde, que c’est l’image de Carla Bruni qui intéresse son mari dans cette effusion médiatique. Elle
contrebalancerait son image à lui, à laquelle les sondages montrent une adhésion de moins en moins marquée, mais sans qu’il y ait un véritable effondrement (y’aurait-il donc un effet Carla
là-dedans ?).
Poussons un peu plus loin l’analyse, du côté du storytelling.
Le voyage en Espagne du couple est sur ce point enrichissant.
Les médias espagnols ont pu qualifier Carla Bruni de « véritable étoile de l’Elysée », en s’extasiant sur les talons de 5 cm de ses chaussures et la longueur de ses robes. Du coup, la thématique du voyage est passée largement au second plan, et le supposé duel Sarkozy-Zapatero a été éclipsé par celui qui est sensé opposer la belle Carla et son homologue, la jeune et également belle Laetizia d’Espagne.
Et cela tombe bien. Aujourd’hui, plus personne n’entend parler de la fameuse polémique sur les paroles attribuées à Nicolas Sarkozy au sujet de
Zapatero. Exit.
Carla Bruni accapare les flashes : tant mieux pour Nicolas Sarkozy, elle lui fournit un écran de fumée protecteur. En plus, elle
le dit elle-même : « je ne suis pas une politique », fumée toute blanche assurée. Elle organise un défilé permanent ? Tant mieux aussi : elle cristallise une part de
bling-bling sur elle, ce qui rééquilibre l’image de son mari. Elle a ce que l’on aime aujourd’hui : un côté clinquant au juste niveau, ni trop, ni pas assez, qui plaît à la presse
puisqu’elle lui permet de grossir le trait sans paraître caricaturale, crédibilité préservée. A côté d’elle, Nicolas Sarkozy peut être un peu bling-bling sans choquer, puisqu’il est juste l’homme
qui l’accompagne. « L’homme qui l’accompagne » : c’est ce que disait être J.F. Kennedy, avec son épouse Jackie. Il y a peut-être quelque part un rêve de filiation avec ce
couple mythique ; eh quoi : ce sont les médias qui le disent, modestie préservée !
Carla Bruni peut aussi, au besoin, déplacer le focus du public sur une autre histoire, celle qu’elle véhicule : le pays va mal,
qu’importe puisque Carla Bruni « ose » saluer la reine d’Espagne en lui faisant la bise. Carla Bruni en muse de l’optimisme, ce n’est peut-être pas grand-chose, mais contre la crise, on
n’a rien de plus positif à se mettre sous la dent.
Mais qu’on ne se leurre pas : derrière tout cela, c’est bien Nicolas Sarkozy qui est le vrai chef d’orchestre et Carla Bruni
l’orchestre. Chez les Bruni-Sarkozy, on travaille en couple et pour le même objectif politique. Et ce n’est même pas choquant.