L'incontournable moment arrive après sa journée de travail, le petit cocktail auquel Mirabelle se doit d'assister. Pas le choix. Les enfants seront certainement couchés quand elle rentrera.
Là voici donc sur la route en direction de son domicile, elle est stoppée par des policiers pour un contrôle d'alcoolémie. De bonne grâce, elle se soumet et le résultat tombe 0,52 g.
Qu'est-ce qu'on attend comme suite à cette histoire ?
Quand elle m'a été racontée, mon imagination tricotait la fin, un peu drôle, voiture laissée sur place et marche à pied à une heure indue dans une banlieue déserte. Je m'apprêtais à rire.
Et bien non, pas du tout.
Mirabelle a été embarquée manu militari, menottée en pleurs, accompagnée par les sourires sarcastiques des policiers. Arrivée au poste, une femme lui a gentiment proposé de manger une barre énergétique (prévue pour elle-même) et de boire de l'eau afin de minorer le contrôle suivant (il y avait quand même "une" sympa dans le lot). Las, les 0,52 g ont été confirmés. Évidemment, elle a demandé à téléphoner voyant la tournure de la situation pour prévenir sa maisonnée. Le coup de téléphone insistant n'a pas sorti du sommeil profond sa famille… Mirabelle a voulu ré-essayer. Impossible, elle n'avait droit qu'à un coup de fil.
Les sourires moqueurs des flics devant son désarroi et ses larmes l’ont traumatisée. Ils se réjouissaient de confronter une personne à ce genre de traitement, bêtise et méchanceté. Les menottes accrochées à la chaise pour retenir ses 45 kg assuraient sans doute la sécurité de ces courageux officiers, armés jusqu’aux dents.
La voici donc enfermée dans une cellule après avoir refusé la couverture crasseuse qui lui était tendue. Elle a passé la nuit dans l'odeur pestilentielle de la geôle dont elle a pu admirer les souillures faites de traces de doigts (d’où l’odeur nauséabonde) et les graffitis obscènes au petit jour.
La garde à vue a duré jusqu'à 17 heures, le lendemain.
Pourtant, elle devait impérativement être à son bureau, mais quoi de plus prioritaire que le bilan chiffré du gouvernement, à présenter, à l'issue des 5 ans.
Je ne fais pas l'apologie de l'alcool au volant, vous l'aurez bien compris. Je constate simplement que la tolérance zéro ne s'applique jamais à la délinquance financière.
Il y a une culture du résultat, des objectifs à remplir sous l'ère Sarkozy.
Voici donc une mère de famille lambda qui tombe dans le filet des quotas. (Révélé par un policier).
Détail important, Mirabelle n'est pas une alcoolique invétérée, son casier judiciaire vierge ne concurrence pas celui de frères tristement célèbres. Son fils aurait pu se trouver à la sortie de l'école sur un vélo ressemblant étrangement à un autre … Non, je déraille, deux arrestations par famille, ce serait excessif mais au train où les coupat-bles sont recherchés :
Le bilan sécuritaire sera l'argument fort-ement chiffré des futures présidentielles.
Et il compte bien être ré-élu là-dessus… What else ?
Agathe d’après une histoire vraie racontée par Alexou
Nota Bene : Etrangement alors que je viens de relater cette histoire. Je suis allée dîner , le soir-même, avec une amie dans un resto. Arrivées à 10 minutes de chez moi, des policiers nous font signe de nous garer (il est 1 h 30 du matin). Deux policières et un policier. Mon amie sort ses papiers. Tout va bien jusqu'au "Contrôle technique". Elle répond : "Je ne l'ai pas fait". Le policier lui demande pourquoi "Je n'ai pas d'argent, je sais, je suis en retard d'un an, ça coûte 80 euros". Une des policières lui dit qu'elle devrait s'adresser ailleurs qu'il y a moins cher et que l'amende pour défaut est de 90 euros si on paie dans les trois jours et majoré à 135 € après cette date. Ma copine s'inquiéte "vous allez me mettre une amende ?" La policière ajoute qu'elle pense que mon amie a bu..."Oui, c'est vrai, j'ai bu deux verres en mangeant". A ce moment, une des policières nous menace d'un carton rouge en souriant, mon amie rit en lui disant : "c'est une blague pour une caméra cachée ?" et la policière sort de sa poche un carton rouge qu'elle brandit sous les regard hilares de ses collégues. Les policiers ont recommandé gentiment à mon amie de dormir chez moi plutôt que de rentrer chez elle.
Imaginez ce qu'il m'est passé par la tête quand nous avons été contrôlées après la mésaventure dramatique de Mirabelle. Et bien, voilà trois policiers qui méritent d'être cités pour leur attitude sympathique et leurs sourires.
C'est dit.