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Ces Audi qui me font peur

Publié le 25 mai 2009 par François Némo @ifbranding

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Je tournais depuis un certain temps autour de cette question : Pourquoi certains modèles d’Audi me font-elles froid dans le dos ? J’ai trouvé la réponse sur l’autoroute, dans le rétroviseur central de ma vieille Scénic. Une Audi dont je n’aurais pas su qualifier le modèle collait à mon pare-chocs. J’ai cru en l’espace d’un instant à la présence d’un mutant, entre l’homme et la machine, comme un androïde évadé d’une fiction. J’ai compris qu’il se passait quelque chose de nouveau sur nos voies de circulation, comme une rupture dans la mythologie automobile. Ces yeux terriblement vivants et surtout terriblement méchants. Un regard paralysant. J’ai aussitôt associé sur la DS (Déesse) en actionnant mon clignotant.

La nature du glissement

J’ai compris la nature du "glissement" en me plongeant, quelques heures plus tard dans "Mythologies" de Roland Barthes. En quoi consistait le décalage entre l’Audi nouvelle génération et la Déesse d’il y a 50 ans. Je reprendrai les mots de Roland Barthes pour décrypter ce que fut ce monument d’époque. "Une automobile à la fois spirituelle et objective, plus ménagère, mieux accordée à cette sublimation de l’ustensilité que l’on retrouve dans nos arts ménagers contemporains, conçue désormais comme confort plus que comme performance". Il évoquait "une gourmandise de la conduite, le besoin de toucher, un goût pour la légèreté, l’amorce d’une nouvelle phénoménologie de l’ajustement, comme si l’on passait d’un monde d’éléments soudés à un monde d’éléments juxtaposés et qui tiennent par la seule vertu de leur forme merveilleuse, ce qui, bien entendu, est chargé d’introduire à l’idée d’une nature plus facile, merveilleuse"
Regardez maintenant la nouvelle Audi, regardez-là bien en face, sa calanque et le trouble qu’elle dégage, une mâchoire, des dents, des yeux plissés, une allure de tueuse… Si le reste du véhicule a conservé ses formes traditionnelles, quelque chose de "méchant" se passe sur l’avant. C’est un regard, une présence. Comme un personnage, une envie de "bouffer" le monde ?

Une idée en germe chez tous les fabricants

Si la Déesse était un "objet" ménager qui respectait parfaitement les codes du langage, une distance entre le sujet et l’objet qui crée de la symbolique. L’Audi est tout au contraire une "présence" qui nous interpelle directement, ici, maintenant, en excluant toute médiation. N’y a-t-il pas comme un passage à l’acte dans la représentation, comme un verrou qui saute, un basculement dans la jouissance. C’est le premier glissement. Le second étant la "méchanceté" en opposition avec la nature "facile et merveilleuse" de la Déesse. Tiré par les cheveux me direz-vous, observez bien autour de vous, chez tous les fabricants cette idée est en germe. Audi a poussé l’idée plus loin que ses concurrents.

Les nouveaux modèles d’Audi traduisent-ils l’esprit de notre époque, une forme de transgression méchante que l’on peut opposer à la nature merveilleuse et optimiste de la Déesse, conçue il y a 50 ans en période de croissance. Inquiétant me direz-vous. Personne ne sait ce que l’avenir nous réserve, mais en tout état de cause, nos voitures restent un merveilleux reflet de nos états profonds. A l’image de cette réflexion de Roland Barthes dans les années 50, "l’équivalent assez exact des grandes cathédrales gothiques".


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