Comme il l’avait annoncé lors du débat, le groupe socialiste de l’Assemblée nationale a déposé un recours devant le Conseil
constitutionnel visant à obtenir la censure de la loi HADOPI. Les députés PCF et Verts se sont associés à cette saisine.
Le texte de la saisine au
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Les requérants estiment que ce texte est d’ores et déjà inapplicable et coûteux et qu'il ne règle nullement le problème de la juste rémunération des artistes à l'heure du numérique. Il serait ainsi manifestement inapproprié à l’objectif affiché.
Le dispositif de sanction graduée constituerait une sanction mécanique en écartant l'intervention du juge judiciaire. Cette sanction serait également disproportionnée au regard notamment de la « double peine » résultant de l’obligation pour l’abonné dont l’accès à Internet a été suspendu de continuer à payer le prix de son abonnement. Ce système massif de sanction serait incompatible avec le principe constitutionnel du droit à un procès équitable.
Les parlementaires de l’opposition estiment que la violation du principe de présomption d'innocence est flagrante puisque des abonnés pourront se voir sanctionnés alors même qu'ils n'auront commis aucune infraction. Lors des débats à l'Assemblée nationale, la Ministre de la culture avait elle-même reconnu que le délit de téléchargement illégal pouvait être commis par une autre personne que le titulaire de la connexion Internet.
Le texte de la saisine souligne aussi qu’un tel dispositif implique également une surveillance générale et constante du réseau Internet par une Haute Autorité aux pouvoirs exorbitants et méconnaît ainsi le droit au respect de la vie privée.
Enfin, même s’il ne revient pas au Conseil constitutionnel d’effectuer un contrôle de conventionalité, son attention a été attirée par la nécessaire prise en compte de la législation européenne afin d’anticiper de futures contradictions .En effet, le Parlement européen vient d’adopter en seconde lecture, à une très large majorité, un amendement disposant «qu’aucune restriction aux droits fondamentaux des utilisateurs d’Internet ne peut intervenir sans une décision préalable de l’autorité judiciaire». La commissaire européenne en charge du «paquet télécom», Viviane Reding souligne que cet amendement est un «rappel important des principes essentiels du droit qui régissent l’ordre juridique communautaire et, en particulier, des droits fondamentaux des citoyens».